Monsieur le Premier ministre, deux années de concertation s'achèvent dans la cacophonie et la confusion, avec le mouvement de grève le plus long depuis mai 1968. À chacune de leurs prises de parole, les ministres et parlementaires de votre majorité ne font qu'ajouter à l'inquiétude. Votre gouvernement réussit même l'exploit de plonger les Français dans le doute quant à la soutenabilité du système de retraite au moment même où il revenait à l'équilibre. Ayant jusqu'à présent galvaudé le dialogue social, vous entamez des négociations avec les partenaires sociaux et redécouvrez les questions liées au financement et à la pénibilité – tout en ayant envoyé dès la veille un projet de loi au Conseil d'État. Drôle de signal !
Vous prétendiez à une retraite universelle, mais vous multipliez les régimes autonomes en remplaçant les régimes spéciaux par des régimes « spécifiques », tout en sortant les hauts salaires du système contributif, réduisant du même coup de 3 milliards d'euros par an les contributions au pot commun. Vous faites miroiter une retraite à 1 000 euros minimum, mais vous ne répondez pas aux interrogations de ceux qui ne pourront pas faire valoir une carrière complète – ils sont déjà nombreux aujourd'hui et le seront plus encore demain, après votre réforme de l'assurance chômage.
L'unification de notre système de retraite est pourtant nécessaire, mais dans le respect de la justice sociale – une justice qui tient compte des carrières hachées, de la situation spécifique des femmes, de celle des seniors, et de celle des jeunes, qui entrent de plus en plus tard sur le marché du travail. Toutes les avancées que vous proposez ne sont financées que par des baisses de pensions ou par l'allongement de la durée de la vie au travail. Êtes-vous prêt à renoncer à l'âge pivot ?