Mes chers collègues, je suis au regret de vous dire que vos propositions sont inopérantes, l'une comme l'autre.
En ce qui concerne celle que vient de défendre notre collègue Philippe Latombe, si chaque contenu retiré faisait l'objet d'une saisine du juge, nous nous trouverions dans la situation que j'évoquais tout à l'heure – huit millions de vidéos supprimées par YouTube en trois mois et 2 500 contenus supprimés par jeuxvidéo. com par jour : c'est tout bonnement impossible !
Le dispositif proposé par Blandine Brocard est également inopérant. Il repose sur le présupposé selon lequel l'examen d'un contenu a lieu en deux temps, ce qui n'est pas le cas dans un système de modération. Il n'y a pas d'abord un signalement et un traitement du contenu, ensuite la décision de le retirer ou non. Une fois que le contenu passe dans le viseur de la modération, celle-ci a lieu dans un délai de vingt-quatre heures, mais pas en deux temps.
Surtout, la mesure proposée est attentatoire à la liberté d'expression des nombreuses personnes qui ne profèrent pas de contenus haineux. Pour un contenu licite donné, le seul fait de le signaler permettrait d'empêcher son partage, son retweet, sa rediffusion. Or le partage de contenu sur internet est constitutif de la liberté d'expression, à laquelle on ne peut porter atteinte que de façon proportionnée, en présence d'infractions prévues par la loi du 29 juillet 1881, et non de façon préventive et généralisée, ce qui serait inconstitutionnel.