Je vous remercie pour la richesse de vos interventions et de vos questions. Beaucoup ont parlé de communication et d'éducation du citoyen, et en particulier des jeunes. Je pense que nous sommes collectivement assez mauvais sur ces sujets. Lorsque nous remettons sa carte vitale à un jeune de 16 ans, nous ne lui donnons aucune explication. Je rappelle qu'à la fin de ses mémoires, Pierre Laroque écrit que le sujet le plus important est « l'éducation à la solidarité », que nous ne pratiquons pas. Certains pays comme l'Uruguay font cela très bien. L'éducation de la jeunesse doit bien entendu porter également sur les responsabilités.
Comme vous le savez, je suis également directeur de l'École nationale supérieure de sécurité sociale, installée à Saint-Etienne. J'organise tous les deux ans un concours avec l'éducation nationale, permettant aux jeunes de réfléchir à ces différents sujets. Ceux d'entre vous qui sont intéressés pourront assister à la remise des prix le 1er avril prochain, afin de découvrir les productions des jeunes. Notre site Sécu-jeunes.fr propose de la documentation et s'efforce de communiquer de façon simple. Nous accueillons de nombreuses écoles, 800 jeunes ; nous organisons des ateliers, de nombreuses activités, etc.
Beaucoup de choses devraient être faites pour travailler très en amont sur la formation de ce que j'appelle la citoyenneté sociale, dans une vision de droits et de devoirs. Nous sommes malheureusement assez mauvais dans ce domaine, et nous le payons plus tard par une certaine conflictualité et par certains comportements individuels. J'observe d'ailleurs que les écoles de dirigeants ne forment pas du tout à ce genre de sujets : le social n'y est pas la discipline la mieux traitée. Un immense effort collectif s'impose.
Le sujet de la citoyenneté est un enjeu majeur. C'est bien l'objet de la recommandation n°14. Je relève incidemment que la communication sur le site des impôts – « À quoi servent vos impôts ? » – ne trouve pas sur le site de la sécurité sociale un équivalent de même qualité, qui pourrait s'intituler « À quoi servent vos prélèvements sociaux ? ».
Il est vrai que l'examen du PLFSS est rapide et que les sujets sont quelque peu survolés. Je pense qu'il conviendrait d'approfondir ce travail en se focalisant chaque année sur une thématique privilégiée (le médicament, l'hôpital, la politique familiale, etc.). Il faudrait aussi privilégier l'approche pluriannuelle en revenant par exemple tous les cinq ans sur un sujet donné, en s'appuyant sur davantage de documents produits par l'administration – et sur les plus utiles, tels que les PQE. Aujourd'hui, les annexes sont volumineuses et difficiles à utiliser pour beaucoup d'entre vous, et même pour les administrateurs. C'est en travaillant avec vous en amont que nous pourrons concevoir des annexes fournissant un support plus efficace pour l'évaluation, sans oublier de mieux travailler avec la Cour des comptes.
Je soutiens que nous avons beaucoup progressé sur la sincérité des comptes, à travers les processus de certification des comptes. Ils sont désormais certifiés positivement, ce qui n'était pas toujours le cas fut un temps. Cela ne veut pas dire qu'il n'y a jamais d'erreur, mais je pense honnêtement que l'image est fidèle. C'est tout l'intérêt des processus de certification que de remarquer les erreurs et de nous faire progresser. Je reste évidemment très attentif à ces sujets, d'autant que les sommes en jeu sont énormes, mais j'estime que nous avons fait beaucoup de progrès et que nous sommes sur la bonne voie.
Tout comme vous, monsieur Delatte, je pense que nous ne faisons pas assez de prévention, et que ce constat amène d'autant plus à plaider en faveur d'une logique pluriannuelle. Les programmes de prévention sont toujours coûteux au début et ne rapportent que dans la durée. Inscrire une stratégie de prévention dans une logique de pluriannualité est donc, encore une fois, très important pour sortir d'une vision se bornant aux économies réalisées dans l'année, qui ne peut plus constituer l'alpha et l'oméga d'une politique de santé et d'assurance maladie.
L'une d'entre vous a posé une question sur le « cinquième risque ». Je n'ai pas employé ce terme car, pour ma part, j'estime qu'il faut reconnaître le chômage et la perte d'autonomie comme des risques à part entière, en plus des quatre premiers.
S'agissant de la CNSA, je n'ai pas grand-chose à dire de plus que dans mon rapport « Grand âge et autonomie », qui préconise un renforcement de ses compétences. La CNSA doit être positionnée davantage comme garante de l'équité territoriale. Le sujet des disparités territoriales est d'ailleurs revenu très souvent à l'occasion des nombreuses présentations que j'ai assurées partout en France à la suite de mon rapport.
Je reste à votre disposition si vous souhaitez continuer à échanger sur ces sujets fondamentaux. J'insiste sur l'importance de la cohérence de l'ensemble du système. Si nous souhaitons conserver le sens de la construction de la sécurité sociale dans la durée, atteindre des équilibres financiers de moyen terme et fonctionner de façon démocratique, il faut changer les choses ; c'est l'ensemble qui fait une construction solide.