La Nouvelle-Calédonie est un des territoires ultramarins, rattaché à la France depuis 1853. Doté d'un statut de territoire d'outre-mer dès 1946, cet archipel doté de richesses naturelles et minérales exceptionnelles a connu d'importantes tensions politiques autour de la question de son accès à l'indépendance. L'histoire des années 80 a été marquée par une grande instabilité et par des violences que nul ne souhaite revoir.
Ce sont les accords de Matignon, signés en 1988 sous l'égide de Michel Rocard, confortés par l'accord de Nouméa du 5 mai 1998, qui ont apporté à la Nouvelle-Calédonie une situation institutionnelle apaisée. Le préambule de l'accord de Nouméa – un très beau texte – rappelle bien la genèse du drame : « Lorsque la France prend possession de la Grande Terre [… ], le 24 septembre 1853, elle s'approprie un territoire selon les conditions du droit international alors reconnu par les nations d'Europe et d'Amérique, elle n'établit pas des relations de droit avec la population autochtone. [… ] Or, ce territoire n'était pas vide. La Grande Terre et les îles étaient habitées par des hommes et des femmes qui ont été dénommés kanak. Ils avaient développé une civilisation propre, avec ses traditions, ses langues. » Nous savons qu'ensuite sont venues les victimes de l'histoire avec le bagne, puis des travailleurs en grand nombre, attirés par le boom du nickel. Le texte de l'accord de Nouméa poursuivait : « Le moment est venu de reconnaître les ombres de la période coloniale, même si elle ne fut pas dépourvue de lumière. »
Nous nous situons donc bien dans une démarche de décolonisation pacifique, menée sous le regard attentif de l'ONU – l'Organisation des Nations unies – , et il nous faut respecter cette idée de base. L'accord de Nouméa prévoyait que seuls les électeurs inscrits sur une liste spéciale, répondant à des critères précisément définis – avec trois corps électoraux différents, dont la liste électorale spéciale – , puissent participer à la consultation sur l'accession de la Nouvelle-Calédonie à la pleine souveraineté.
La démarche respectée unanimement depuis l'accord a consisté à résoudre les difficultés rencontrées au sein du comité des signataires et à avancer vers la consultation en recherchant le plus possible le consensus entre les différents protagonistes. Le XIXe comité des signataires, qui s'est tenu le jeudi 10 octobre 2019 à Matignon, a proposé de reconduire l'ensemble du dispositif opérationnel créé pour le premier référendum, moyennant quelques ajustements techniques. S'agissant du corps électoral, il a été acté que l'inscription automatique sur la liste spéciale ne devait être reconduite que pour les électeurs de statut coutumier, tandis que les électeurs relevant du droit commun – c'est-à-dire les non-Kanaks nés en Nouvelle-Calédonie et y résidant depuis plus de trois ans – n'y sont pas inscrits d'office, mais doivent s'y inscrire, ce qui ne remet pas en cause leur droit de vote.
Le comité des partenaires, qui avait buté sur cette difficulté, a proposé une solution. Le Premier ministre a suggéré que les non-Kanaks nés en Nouvelle-Calédonie et y résidant depuis plus de trois ans soient identifiés et contactés personnellement afin qu'ils fassent la démarche de s'inscrire sur la liste. Cela a été fait : un grand nombre de personnes ont été contactées, ce qui réduit finalement à peu de monde ceux qui habitent l'île et n'ont pas effectué la démarche d'inscription.
Calédonie ensemble prit acte de cette proposition. Or la règle, dans les comités des signataires, est depuis toujours de ne pas remettre en cause les compromis trouvés.