Vous avez été aussi précis à l'oral que vous l'aviez été à l'écrit et vous avez apporté des éléments de réponse assez engagés quant à la façon dont vous comptez remplir la fonction à laquelle le Président de la République envisage de vous nommer. Je souhaite vous adresser à présent quelques questions complémentaires.
Un rapport du 6 décembre 2019 du Groupe d'États contre la corruption (GRECO) du Conseil de l'Europe comporte des préconisations pour améliorer la prévention de la corruption en France. Il souligne notamment le fait que les obligations déclaratives ne concernent, à l'heure actuelle, que les représentants d'intérêts, et non les personnes occupant des « hautes fonctions de l'exécutif » au niveau national qui acceptent de le rencontrer. Le Conseil de l'Europe préconise donc que la règle évolue pour que ces personnes soient dans l'obligation de déclarer leurs contacts avec des lobbyistes, y compris quand ces contacts sont pris à l'initiative de l'autorité publique. Mais puisque vous avez répondu par avance à ma question en indiquant que le critère de l'initiative devait évoluer, ce dont je me réjouis, je ne mentionne cet élément que pour mieux le souligner.
Par ailleurs, j'ai relevé, dans vos réponses au questionnaire, que vous partagez les critiques que nous sommes nombreux à formuler quant à l'affaiblissement de l'intention du législateur qui ressort de la lecture du décret du 9 mai 2017 relatif au répertoire numérique des représentants d'intérêts. Ce texte rend, en effet, parcellaire et difficile le recensement confié à la HATVP, en ajoutant à la définition de représentant d'intérêts deux critères qui n'avaient pas été prévus par le législateur. Le premier est celui du seuil de dix entrées en relation à partir duquel on serait considéré comme lobbyiste et en deçà duquel on ne le serait pas. Le second fait appel à la notion assez farfelue, et d'ailleurs très difficile à évaluer, de mi-temps consacré à cette activité. Ainsi, si l'on exerce une activité à mi-temps dans une grande structure privée – quand bien même on occuperait l'autre partie de son temps à jouer au golf, par exemple –, on ne pourrait pas, par définition, être considéré comme un représentant d'intérêts. Ce décret, qui va de manière évidente à l'encontre de l'intention du législateur, pose donc problème. Quelle clarification envisagez-vous en la matière ? Si un décret est contraire à une loi, laquelle de ces deux normes doit être appliquée ? Il est tout de même regrettable que ce texte prime sur l'application stricte de la loi.
Ma dernière question porte sur les think tanks. Ce sujet est revenu à deux reprises dans l'actualité récente. La première fois, les conséquences furent assez brutales pour le ministre mis en cause ; la deuxième fois, la HATVP a semblé – si l'on en croit, en tout cas, la communication de la personnalité concernée – écarter la question de l'appartenance à un think tank. Pourtant, ceux-ci sont financés et fréquentés par des représentants d'intérêts. Quelle jurisprudence pensez-vous appliquer en la matière, en particulier sur l'obligation de déclarer son appartenance à un tel organisme ?