Je vous remercie tout d'abord de m'accueillir à nouveau dans votre commission, afin d'examiner cette proposition de loi en deuxième lecture, presque un an, jour pour jour, après son adoption à l'unanimité par notre assemblée.
Je veux également remercier l'ensemble des collègues, de tous les bancs, qui ont choisi de voter ensemble ce texte visant à lutter contre l'arrêt cardiaque inopiné et les 40 000 à 50 000 décès qui en découlent chaque année en France. L'objectif est de favoriser l'action de ceux qui agissent face à l'urgence d'un arrêt cardiaque et de les protéger.
Alors que le développement de nouvelles applications mobiles va permettre de solliciter les proches et les voisins d'une personne qui s'effondre, victime d'un arrêt cardiaque, nous devons favoriser l'intervention des citoyens pour gagner de précieuses minutes avant l'arrivée des secours professionnels.
Il faut encourager, désacraliser, protéger. Encourager, en formant et en sensibilisant – alerter, masser, défibriller, cela s'apprend en deux heures ; désacraliser, en expliquant qu'il est simple et sans risque de se former et d'intervenir ; protéger, en créant le statut de citoyen sauveteur.
Le Sénat a apporté des modifications à la proposition de loi qui ont, malheureusement, trop estompé son esprit initial. Dans une attitude constructive, je propose de conserver certaines de ces modifications, tout en réintégrant quelques dispositions dans le texte, en cohérence avec son objectif originel – la lutte contre l'arrêt cardiaque et la sensibilisation aux gestes qui sauvent.
Le Sénat a tout d'abord choisi de changer le titre de la proposition de loi et la rédaction de l'article 1er, afin de supprimer toute mention du statut de citoyen sauveteur, qui figurait pourtant au coeur du texte. Je voudrais revenir sur cette notion essentielle. En cas d'arrêt cardiaque, chaque minute qui s'écoule sans massage ni compression thoracique correspond à 10 % de chances de survie en moins pour les victimes. Au bout de dix minutes sans intervention, elles n'ont quasiment plus aucune chance de survie.
Trois éléments fondamentaux sont à l'origine de la création du statut de citoyen sauveteur. En France, les secours mettent en moyenne treize minutes à arriver sur le lieu d'un accident. En cas d'arrêt cardiaque, c'est trop tard si aucune intervention extérieure n'a eu lieu. Nous savons également que, dans 70 % des cas, les arrêts cardiaques inopinés se produisent en présence d'un témoin. Aujourd'hui, le taux de survie n'est que de 5 à 7 % en France. Si nos concitoyens étaient mieux sensibilisés au massage cardiaque, qui est un geste simple, nous pourrions collectivement sauver des milliers de vies chaque année. Si le taux de survie passait en quelques années de 7 % à 15 %, nous pourrions ainsi sauver plus de 3 000 vies par an.
Les professionnels de la santé et du secours que mon collègue Hugues Renson et moi-même avons rencontrés lors de l'élaboration de ce texte – nous avons travaillé pendant deux ans – ont souligné qu'il est important d'encourager nos concitoyens à intervenir en pratiquant le massage cardiaque dès les premières secondes.
Nous avons voulu définir un statut particulier afin de protéger ceux qui effectuent des gestes de premiers secours pendant les premières minutes. Par ce statut, nous avons également souhaité reconnaître l'engagement citoyen de celui ou de celle qui agit de façon bénévole. C'est pourquoi nous avons choisi les termes de « citoyen sauveteur ». Ce statut désigne bien l'acte de civisme de celui ou de celle qui porte secours, et il précise les protections civiles et pénales dont bénéficie le citoyen au moment où il vient en aide à autrui.
Disons-le clairement, ce statut ne protège que lorsqu'on agit. Le citoyen sauveteur bénéficie alors de la qualité de collaborateur occasionnel du service public. J'ai déposé plusieurs amendements à l'article 1er afin de rétablir les termes de « citoyen sauveteur » et d'introduire une référence aux compressions thoraciques dans la rédaction adoptée par le Sénat.
Par ailleurs, le Sénat a choisi de supprimer l'ensemble des dispositions relatives à la sensibilisation au massage cardiaque que nous avions voulu instaurer à différents stades de la vie. Je propose de rétablir l'article 2 qui tend à créer un continuum éducatif entre le premier et le second degré. Pour les enfants, qui apprennent à alerter en cas d'accident en primaire, l'entrée en sixième sera un moment clé de l'apprentissage, avant la formation « prévention et secours civiques » de niveau 1 (PSC1), d'une durée d'une journée, en troisième.
Je souhaite également rétablir l'article 4, qui ouvrait la possibilité, pour les salariés, de bénéficier d'une sensibilisation aux gestes qui sauvent, de deux heures, avant le départ à la retraite. Afin d'atteindre l'objectif de former 80 % de la population, qui a été fixé par le Président de la République, il faut en effet trouver une solution pour sensibiliser les actifs.
Je vous propose, en revanche, d'adopter les articles 5, 7 et 11 dans leur rédaction issue du Sénat.
Enfin, j'ai déposé un amendement tendant à rétablir l'article 12 bis, qui a pour objet de rendre publics une série d'indicateurs sur l'arrêt cardiaque (nombre de victimes, nombre d'interventions, taux de survie etc.). Il s'agit de disposer de données permettant de suivre les actions et les progrès enregistrés en la matière.
Je tiens à saluer à nouveau le travail et l'engagement de tous ceux qui viennent en aide – citoyens, associations de protection civile, médecins, urgentistes, pompiers, professionnels des secours. Merci à tous ceux qui sont en première ligne, au quotidien, pour sauver des vies.
Je remercie également Hugues Renson et nos collaborateurs. Nous travaillons ensemble depuis deux ans pour lutter contre l'arrêt cardiaque inopiné, en nous tenant à l'écoute des acteurs, et pour faire ainsi avancer une cause encore trop méconnue, bien qu'elle touche près de 50 000 Français et leurs familles chaque année.
C'est la fierté du législateur d'inscrire dans la loi des mesures attendues par ceux qui sont en première ligne afin de porter secours, et c'est un honneur de présenter ce texte à votre commission. J'espère qu'il recueillera à nouveau votre assentiment et votre confiance, à l'instar du vote à l'unanimité en première lecture, le 19 février dernier.