Je voudrais répondre au rapporteur, qui a dit qu'on n'allait pas philosopher pendant des heures. Je vous propose de regarder un cas très pratique qui montre que le système n'est pas universel et qu'il est en outre injuste ou, comme l'ont dit nos camarades communistes, inéquitable. Prenons une génération pour laquelle l'âge d'équilibre serait de 65 ans. Une ouvrière et une cadre travaillent, toutes les deux, quarante-trois ans : l'ouvrière, ou l'ouvrier, commence à travailler plus tôt, à 20 ans – c'est propre à ce type de carrière –, et part à la retraite à 63 ans ; dans le système à points, compte tenu de l'âge d'équilibre, cette personne a deux ans de décote, ce qui signifie 10 % de pension en moins ; le ou la cadre, qui travaille aussi quarante-trois ans, mais qui est plutôt entré sur le marché du travail vers 24 ans, parce qu'il ou elle a fait des études, aura donc, en partant à la retraite à 67 ans, une surcote de 10 %. Quand on regarde l'écart entre les ouvriers et les cadres en matière d'espérance de vie – il est de six ans – on voit bien l'injustice profonde du système que vous voulez créer.
Comme j'aime aussi la philosophie, permettez-moi de citer Barbara Stiegler. Elle a comparé le régime que vous proposez à un jeu vidéo : en effet, chacun devra gagner, dans les différents temps de son existence, des points de vie ou de survie et on ne pourra s'en prendre qu'à soi-même si le score est trop faible. Il y a un premier jeu, dans votre système de répartition, qui est lié à la dévaluation du point – on ne sait pas, quand on commence, quelle sera la valeur de rachat du point à la fin – mais il existe aussi une autre partie qui se joue sur le marché de la capitalisation et qui fera de tout rentier un acteur compétitif. Voilà votre système.