Mme larapporteure spéciale vous a présenté le détail des crédits alloués en 2018 à la protection et à l'insertion sociale des plus vulnérables. La Cour des comptes a constaté qu'il manquait 700 millions d'euros au budget de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » voté l'an dernier pour financer les allocations que les caisses d'allocations familiales avancent pour l'État. L'Assemblée nationale en a pris acte. Elle a adopté, en première lecture, une programmation budgétaire qui ajoute près de 4 milliards d'euros en trois ans au budget de cette mission.
Cette hausse traduit la volonté d'une véritable politique de lutte contre la pauvreté, de la protection des familles vulnérables et de la prévention des risques d'exclusion. C'est dans cette intention que s'inscrivent notamment la revalorisation de la prime d'activité et l'augmentation de l'allocation aux adultes handicapés. Les crédits alloués à l'aide alimentaire, à la protection juridique des majeurs, à l'égalité entre les femmes et les hommes se voient au moins reconduits.
Les crédits concernant le dispositif d'accueil et d'orientation des mineurs isolés étrangers, inclus dans le programme 304 ayant été multipliés par huit, ils méritent que l'on s'y attarde. Ils sont destinés à rembourser et aider les départements chargés de la prise en charge des mineurs non accompagnés, prise en charge initiale et suivi social et éducatif.
C'est le sujet thématique que j'ai choisi de développer dans ce rapport. Il dépasse bien évidemment le simple avis budgétaire et s'inscrit dans une nécessité organisationnelle, voire juridique, et une politique globale de la protection de l'enfance vis-à-vis d'une population singulière. Ces mineurs, privés de l'encadrement de leur famille, bénéficient du droit international de protection que doit leur garantir l'État.
Le Premier ministre a annoncé aux départements, le 20 octobre dernier, que l'État apprécierait la minorité et l'isolement des étrangers recueillis dans l'urgence, avant de confier aux présidents des conseils départementaux la responsabilité de ces mineurs isolés étrangers.
Après plusieurs mois de travail et d'auditions sur ce sujet, j'ai entendu de nombreuses critiques et encore plus d'avertissements. Les critiques invitent le Gouvernement à ne pas laisser les départements évaluer seuls de jeunes étrangers sans état civil. Les avertissements l'exhortent à ne pas les considérer comme des migrants clandestins et à ne pas les soustraire au droit commun de la protection de l'enfance sous prétexte que certains départements ne veulent ou ne peuvent plus la leur accorder.
Des experts des corps d'inspection de l'État et des cadres des conseils départementaux ont été convoqués par le Gouvernement pour réorganiser la protection d'urgence des mineurs isolés. Ils devront rendre leurs conclusions avant la fin de l'année pour qu'elles s'inscrivent dans le cadre de la réforme législative de l'asile et de l'immigration. En attendant, le projet de loi pour 2018 inscrit 132 millions d'euros pour la protection des mineurs étrangers isolés dans la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances ». Il y a dans cette provision une subvention nouvelle promise aux départements qui admettent à l'aide sociale à l'enfance un étranger dont l'évaluation confirme qu'il est mineur et isolé. Je souhaite que cette subvention n'encourage pas les placements au rabais qui m'ont été décrits. L'évaluation sociale, la mise à l'abri et la prise en charge des mineurs non accompagnés, qu'elles soient confiées à des associations ou des travailleurs sociaux des départements, ne sont ni harmonisées, ni égales partout sur le territoire.
L'État a annoncé qu'il financerait la protection d'urgence et l'évaluation. Mais il devra aussi garantir une homogénéité des avis rendus et s'assurer que, quel que soit leur mode de placement, les mineurs confiés à l'aide sociale à l'enfance seront traités de façon digne et adaptée.
La singularité du parcours de ces enfants qui peut entraîner une fragilité sanitaire et psychologique importante nécessite un dispositif particulier. Je vous poserai trois questions qui concernent aussi les ministères de l'intérieur et de la justice avec lesquels vous travaillez sur ces sujets.
Premièrement, pouvez-vous nous dire qui mettra à l'abri et qui évaluera, en 2018, les étrangers présumés mineurs et isolés ? Deuxièmement, sur quel programme budgétaire ces mesures d'urgence seront-elles financées ? Comment seront utilisés les 132 millions d'euros inscrits cette année ? Troisièmement, l'État pourra-t-il garantir une prise en charge harmonisée partout sur le territoire métropolitain et ultramarin ?