Monsieur Furst, cher Laurent, la prolifération biologique et chimique est bien traitée dans la revue stratégique : vous trouverez par exemple à la page 39 des éléments qui recoupent votre analyse presque mot pour mot. Nous aurions pu y consacrer plus que deux points sur trois cent vingt et un, mais, croyez-moi, nous aurions fini à sept cents points ! J'insiste sur le fait que tout ce qui est cité dans notre travail, ne serait-ce qu'une fois, est important et a fait l'objet d'une attention particulière. De plus, les risques bactériologiques et chimiques sont mentionnés à plusieurs reprises au cours de notre travail. Nous revenons par exemple sur nos capacités à protéger à la fois les armées et la population contre les agressions nucléaires, radiologiques, biologiques et chimiques (NRBC). Nous sommes pleinement conscients de la menace en la matière, et le fait qu'elle ne fasse l'objet que de quelques points spécifiques ne signifie pas que nous la négligions, bien au contraire.
Monsieur Jacques, à titre personnel, je pense qu'il ne faut pas se faire d'illusions. Nous sommes loin de réalisations concrètes en matière de défense européenne. De fait, ce qui a déjà vu le jour, comme le commandement européen du transport aérien – EATC pour European Air Transport Command – n'est pas intégré à l'Union en tant que telle et relève de coopérations volontaires entre quelques États membres sur un segment limité. Il faut être ambitieux et réaliste à la fois.
Vous évoquez la création d'une force d'intervention pour répondre aux risques de pandémie et de catastrophes naturelles. Permettez-moi de rappeler que ce projet a été proposé à l'origine par Michel Barnier, en 2006 ! Cet été, j'ai constaté que plusieurs collègues évoquaient cette idée à juste titre au moment des feux de forêt en Provence : ils avaient bien raison, mais l'idée ne date pas d'hier. Il faut être conscient que si ce projet n'a pas abouti précédemment, c'est sans doute qu'il a rencontré des obstacles qui ne disparaîtront pas du jour au lendemain.
Vous avez cité la possibilité que des pays européens puissent se greffer sur nos bases à l'étranger et outre-mer. Je vous avoue que lors de nos premières discussions au sein du comité nous doutions de la volonté de nos partenaires en la matière. Nous avons eu la surprise de constater que plusieurs d'entre eux étaient partants.
Cette ébauche d'évolution est particulièrement intéressante car elle montre que certains Européens sont désormais prêts à prendre davantage de risques et à adopter une lecture stratégique commune avec nous sur certains intérêts qui peuvent dépasser l'Europe. Sachant que la France pourra difficilement revitaliser seule une politique de prépositionnement, compte tenu des contraintes humaines et matérielles, la présence d'alliés européens à nos côtés est prometteuse.