Intervention de Jean-Luc Mélenchon

Réunion du jeudi 6 février 2020 à 21h50
Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi instituant un système universel de retraite et le projet de loi organique relatif au système universel de retraite

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Luc Mélenchon :

Il y a tant à dire !

Le collègue Mattei a dit tout à l'heure que, sur un sujet aussi compliqué et technique que celui de la retraite des marins, il valait mieux discuter en dehors du Parlement, et que les choses finiraient ainsi par s'arranger. Or, vous remarquerez qu'avec l'amendement du rapporteur qui vient d'être adopté, on précise les choses à un certain degré de technicité...

Il me semble nécessaire de faire un rappel historique. Les ordonnances étaient un matériau rare dans la Constitution de 1958. Entre le moment où elle a été promulguée et la première fois où le général de Gaulle s'en est servi, il s'est écoulé deux ans, puisque c'était en 1960 – pour des circonstances exceptionnelles, en lien avec la guerre d'Algérie. L'ordonnance n'était pas conçue comme une technique parmi d'autres, qu'on aurait fourrée dans la musette sans y réfléchir.

Tous les adversaires de la Constitution de 1958 ne manquaient pas d'affirmer que les ordonnances constituaient un moyen d'une incroyable brutalité, en ce qu'elles constituent un transfert du législatif vers l'exécutif. Vous pouvez prendre le problème par tous les bouts, vous en reviendrez toujours à cela ! Alors que les parlementaires ont longtemps refusé d'admettre ce procédé, il faudrait aujourd'hui l'accueillir avec joie, vingt-neuf fois d'affilée ?

Notre collègue Elimas a eu raison de rappeler que ce n'est pas la première fois qu'on recourt aux ordonnances... mais c'est bien le problème ! On est passé de 104 utilisations des ordonnances pendant quarante ans à 185 en cinq ans, comme si c'était devenu un mode de légiférer ne différant pas des autres.

Personnellement, je me moque bien de savoir quel gouvernement, qu'il soit socialiste ou de droite, a utilisé le plus d'ordonnances. Dans notre législation, il a toujours traîné des remugles de l'Ancien Régime. Qu'on se souvienne, par exemple, que le délit d'offense au chef de l'État n'a été supprimé du droit français qu'en 2013 – après l'affaire du « Casse-toi pauvre con ! ». On avait découvert à cette occasion que ce délit remontait à Tibère ! Il en est de même pour les ordonnances, qu'on peut voir comme un héritage de l'autorité législative du roi. De nos jours, gouverner par ordonnances alors qu'il existe une assemblée parlementaire, ce n'est pas une méthode traditionnelle en démocratie.

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