Je vais vous décrire le futur système.
Vous prévoyez un cadrage de la masse totale qui est prélevée sur la richesse du pays. Cela figure dans le rapport de M. Delevoye. Je rappelle ce qu'il a déclaré sur France Inter, le 11 octobre 2018 : « Nous allons tout revisiter. Toutes les questions sont sur la table. Mais il y a un budget : 14 % du PIB – c'est un plafond. » Vous pourrez naturellement démentir ses propos... Comme vous ne pourrez pas augmenter le nombre de personnes présentes à table, vous allez faire sortir des gens. Le déverrouillage a eu lieu avec la loi « PACTE » : vous annoncez aux cadres et à ceux qui cotisent à un fonds de pension que toutes leurs cotisations seront déduites de leurs impôts, ce qui signifie que ce sont les autres qui vont payer. Par ailleurs, les retraites versées seront exemptées d'impôt à hauteur de 70 %. Voilà pour ceux qui sortiront du dispositif.
Vous annoncerez aussi une retraite de base. C'est pourquoi vous revenez sur la loi de 2013. Vous dites que l'on donnera 1 000 euros à tout le monde, sans préciser à quoi correspond précisément une carrière complète dans votre système à points. Cela introduit, en tout cas, l'idée d'une retraite plancher.
On dira aux autres qu'ils sont trop nombreux et qu'ils doivent se responsabiliser en cotisant de leur côté. J'en veux pour preuve ce que vous avez décidé de faire pour les cadres dont les revenus sont supérieurs à 3 PASS. Le rapporteur a déclaré que cela concerne peu de gens, et il a raison : cela représente 350 000 personnes, mais celles-ci sont particulièrement bien payées. Les patrons versent 3 milliards d'euros de cotisations, et les salariés eux-mêmes contribuent à hauteur de 4 milliards, ce qui fait 7 milliards au total.
Vous verrouillez le système et vous faites sortir des gens du côté de la capitalisation, avec des déductions d'impôt, tout en promettant aux autres qu'ils auront une retraite universelle de petit niveau – de 1 000 euros. Ce n'est peut-être pas votre intention, mais tout est en place pour que le système fonctionne comme je viens de le dire. Tout reposera – on le voit partout dans le monde – sur l'avantage fiscal que vous concéderez à ceux qui accepteront de se tourner vers un régime par capitalisation.
Le jour où on a changé la règle du jeu en Nouvelle-Zélande, 70 % des gens sont revenus à un système par répartition. Tout le monde a fait de même en Argentine, qui est pourtant un pays qui a l'habitude de dévaliser les gens. On a préféré confier son argent à l'État et à un système collectif plutôt qu'aux banques. Voilà la vérité, et voilà le scénario que vous écrivez.