Le démarchage téléphonique abusif et frauduleux exaspère nos concitoyens, qui ne manquent jamais de nous le dire, dans nos permanences ou ailleurs. Il constitue aussi un risque pour des publics fragiles, confrontés à des interlocuteurs parfois peu scrupuleux.
En juin 2018, j'ai défendu devant vous une proposition de loi afin de l'encadrer plus strictement. Aussi n'ai-je pu m'empêcher de sourire en entendant notre collègue Annaïg Le Meur expliquer que La République en Marche entendait « frapper fort ». Tel était pourtant bien le but de ma proposition de loi…
Vous avez rappelé la création par le gouvernement précédent du dispositif Bloctel, qui s'est avéré totalement inefficace. Depuis son entrée en vigueur, les appels intempestifs n'ont pas cessé chez les particuliers qui s'y sont inscrits, et 81 % des Français estiment qu'il ne fonctionne pas. Ouverte il y a très peu de temps, la pétition de l'UFC-Que Choisir visant à interdire le démarchage téléphonique a déjà recueilli plus de 200 000 signatures. On prend ainsi la mesure du phénomène chez nos concitoyens.
Nous estimons que le texte issu du Sénat ne va pas assez loin et qu'il ne répond pas aux attentes de nos concitoyens, légitimement excédés. Nous ne demandons pas non plus l'interdiction totale du démarchage téléphonique – ne caricaturons pas la position du groupe Les Républicains. J'avais proposé la possibilité, pour de petites entreprises, artisans et commerçants, de continuer un démarchage téléphonique qui n'est, la plupart du temps, ni un acte agressif, ni une pression insupportable.
Le rapporteur Christophe Naegelen a évoqué 50 000 emplois à protéger. Or tous les employés de ces plateformes ne se trouvent pas sur le territoire national, beaucoup de plateformes sont installées à l'étranger. Il faut donc relativiser ce nombre d'emplois. De surcroît, lorsque, il y a quelques mois, nous avions abordé la question de l'interdiction des plastiques en soulignant qu'elle entraînerait la fermeture d'entreprises, vous n'aviez pas eu le même réflexe. Je ne voudrais donc pas qu'on utilise l'argument de l'emploi sur certains thèmes et pas sur d'autres.
Si vous voulez vraiment régler le problème, nous devons accepter de passer au système du consentement préalable, comme je l'avais envisagé dans ma proposition de loi. D'autres pays, en Europe mais aussi au-dehors, utilisent ce système de l'opt-in, qui prévaut déjà pour les messageries électroniques et les SMS. Je ne vois pas pourquoi l'opt-in ne pourrait pas bien se passer avec le démarchage téléphonique. Même s'il n'est pas la panacée, il permettrait de limiter fortement le démarchage intempestif.
Je souhaite que nous ayons un esprit constructif. Je note simplement que la majorité qui rassemble La République en Marche et le Mouvement Démocrate et apparentés (MODEM) avait rejeté en bloc, ou quasiment, mon texte, en juin 2018. Aujourd'hui, vous sentez bien la pression de la part de nos concitoyens : il est urgent d'agir.