La responsabilité collective ne veut pas dire grand-chose. Cela veut dire tout le monde, donc personne. C'est pour cela que je préfère que l'on cible.
La deuxième observation, c'est que quand nous avons mis sur pied la commission d'enquête, il y avait des suspicions sur ce que nous allions chercher, mais les ministres – dont vous – ont été totalement d'accord sur le fait que cette commission d'enquête était là pour chercher des preuves. Ce n'est pas pour faire une littérature, c'est une enquête que nous faisons. Qu'avons-nous trouvé ? Nous avons suffisamment d'éléments pour dire que la responsabilité de l'État ne doit pas être seulement reconnue, mais est engagée. Pour quelle raison j'emploie cette expression ? C'est parce que l'État savait en 1969 que le chlordécone est extrêmement dangereux. Nous vous en apporterons la preuve. Je pense qu'il y a une démonstration extrêmement claire. En 1969, la commission d'étude de la toxicité déclare la chose suivante en refusant l'autorisation d'homologation demandée par, à ce moment-là, la SOPHA en 1968, et la société d'exploitation de produits pour les industries chimiques (SEPPIC) en 1969 : « On pose ici le problème de l'introduction d'un nouvel organochloré toxique et persistant ». À partir de cela, on peut se poser la question : comment un système dérogatoire a-t-il pu être utilisé au moins à cinq reprises entre 1972 et 1981 pour pouvoir autoriser ce produit ? Je ne prends que cet exemple, j'aurais pu en prendre d'autres.
J'en prends un second. Comment, après l'incident d'Hopewell en 1975, avec la fermeture de toute production américaine entre 1975 et 1977, avons-nous pu donner une autorisation de vente encore provisoire en 1981, avec une homologation en 1986 ? Comment sommes-nous arrivés en 1972 à donner cette première autorisation ? Simplement parce qu'en 1971, nous avons déclassifié le chlordécone en passant de catégorie A à catégorie C. Cette manipulation a eu lieu exactement quelques mois avant l'autorisation. Nous vous avons donné quelques billes, quelques éléments. Nous en avons davantage. Je voudrais remercier M. Didier Guillaume, qui a tout fait pour que nous ayons tous les éléments. Nous avons toutes les pièces. C'est pour cela que je souhaite que l'on précise. La responsabilité de l'État, madame la ministre, est engagée. Je souhaite que vous répondiez par oui ou par non. La responsabilité de l'État est-elle engagée sur tout le volet autorisation ? Je ne viens même pas sur la question de la prolongation. Nous pourrons en parler.