Avant de passer la parole à mes collègues, qui vous répondront très précisément puisqu'ils travaillent sur ces questions depuis longtemps, je souhaite vous donner une réponse plus générale.
Je n'ai pas participé aux travaux qui ont été menés bien avant le lancement, en 2008, du premier plan chlordédone. Les premières études datent de 2002, lorsqu'il a été possible d'établir les premières valeurs toxicologiques de référence et donc, de mesurer les expositions.
Des méthodes d'analyse permettant de mesurer le taux de chlordécone in situ ont donc été nécessaires. Même si nous nous posons encore des questions quant à leur reproductivité s'agissant notamment de l'utilisation de la spectrométrie de masse – dont les étalons internes permettent de disposer de mesures quantitatives – celles-ci se sont développées depuis la fin des années quatre-vingt dix jusqu'à nos jours. Chaque fois, la sensibilité des mesures et des analyses a été améliorée.
Au tournant des années quatre-vingt, on ne mesurait pas spécifiquement le chlordécone mais les produits organochlorés dont ce dernier fait partie mais, petit à petit, des méthodes plus spécifiques ont permis de le mesurer et de prendre conscience de l'existence de pollutions directes dans un certain nombre de produits. Mon collègue Jean-Luc Volatier ayant mené des travaux dans ce domaine, je le laisserai en parler. Il pourra évoquer les volets des études Timoun, Karuprostate et Sapotille qui concernent l'ANSES et, avant, l'AFSSET ou l'AFSSA.
Il suffit de regarder l'ensemble des avis que nous avons rendus, d'observer notre participation au comité de pilotage depuis le premier plan chlordécone, le nombre de saisines – que nous n'avons pas recensées - voire le nombre d'actions du plan chlordécone qui ont été menées par l'ANSES pour se rendre compte qu'il s'agit là d'une priorité. Je l'ai dit : l'ensemble des expositions environnementales et par voie alimentaire est un sujet majeur de préoccupation pour l'Agence.
Nous souhaitons que les études de l'alimentation totale permettent d'avoir la vision la plus précise possible de l'exposition des populations antillaises compte tenu d'un certain nombre de spécificités : l'insularité, la production locale, les habitudes alimentaires – consommation, préparation. Des différences existent-elles par rapport à l'ensemble de l'exposition ? C'est l'objet même de l'enquête Alimentation totale dont le budget, important, s'élève approximativement à 2 millions d'euros pour chacun des deux territoires. J'ajoute que ces études nécessitent environ quatre ans de travail, ce qui représente un gros investissement justifié par les interrogations qui se posent à nous.
Il s'agit donc, dès le départ, d'une priorité pour l'Agence.
Gérard Lasfargues ayant été à l'AFSSET dès 2007, il vous expliquera ce qu'ont été les préoccupations de cette agence, puis, Jean-Luc Volatier pourra répondre plus précisément à vos questions.