Monsieur le président, monsieur le ministre de l'intérieur, mes chers collègues, la France de 2017 a-t-elle une politique d'immigration ? Après vous avoir entendu à plusieurs reprises devant la commission des lois et à cette tribune, monsieur le ministre d'État, on ne sait pas vraiment – hormis sur les sujets relatifs à la politique de l'asile – si le Président de la République et le Gouvernement ont défini ce qui caractérise une politique, c'est-à-dire de vrais choix procédant d'objectifs clairs. J'appelle donc à nouveau M. le ministre de l'intérieur, au nom des membres du groupe Les Républicains, à sortir du non-dit et à préciser très sereinement cet après-midi les objectifs de la politique d'immigration, s'ils existent.
Première question : le Président de la République et son gouvernement souhaitent-ils augmenter, diminuer ou stabiliser l'immigration légale dirigée vers la France ? Les consuls délivrent des visas, les préfets accordent des titres de séjour ; ces décisions consistent à ouvrir les portes de notre pays au nom du Gouvernement et à autoriser le passage ou l'installation en France. Au cours des cinq dernières années, plus de 1 million de titres de séjour ont été délivrés, soit une hausse de 18 % de 2012 à 2016.
Que prévoyez-vous de faire sur ce point d'ici à 2022, monsieur le ministre de l'intérieur ? Augmenter encore les flux d'immigration ? Si oui, selon quels critères – économiques, démographiques, géographiques ? Avez-vous défini une politique d'immigration de travail ? Envisagez-vous de réguler l'immigration familiale ? Si oui, avec quels outils juridiques, administratifs, diplomatiques ?
En posant ces questions, je formule aussi une proposition : il serait utile que l'Assemblée nationale débatte et vote au début de l'année 2018 non seulement sur les objectifs généraux de la politique d'immigration, mais aussi sur la définition de plafonds chiffrés permettant d'organiser une réduction globale de l'immigration et une régulation des flux.
Deuxième question : quelle est votre estimation du nombre d'étrangers en situation illégale, c'est-à-dire d'immigrés clandestins, séjournant actuellement en France ? 200 000 ? 300 000 ? 400 000 ? Un demi-million ? Quelle est votre estimation, monsieur le ministre d'État ? Nous devons la connaître !
Troisième question : M. Macron et son gouvernement souhaitent-ils augmenter encore le nombre de régularisations, c'est-à-dire le nombre d'immigrés clandestins auxquels le Gouvernement décide de délivrer des papiers ? Au cours des cinq dernières années, 151 000 clandestins ont été régularisés. Emmanuel Macron veut-il, comme François Hollande avant lui, régulariser plus de 150 000 clandestins d'ici à la fin de son quinquennat ? Il s'agit d'une vraie question.
Je vous appelle au contraire, au nom des membres du groupe Les Républicains, à abroger dès maintenant la circulaire du 28 novembre 2012, à rompre avec la politique de régularisations massives – que vous avez d'ailleurs approuvée lorsque vous étiez sénateur socialiste du Rhône – et à en mettre en oeuvre une autre, bien différente, consistant à ne régulariser les immigrés clandestins qu'à titre exceptionnel, au cas par cas, pour des raisons humanitaires.
Quatrième question : combien d'étrangers en situation illégale envisagez-vous de reconduire à la frontière l'année prochaine ? J'ai consulté les documents budgétaires que vous nous avez soumis : l'indicateur relatif aux éloignements n'est pas renseigné. Pourquoi ? Est-ce parce qu'il n'existe pas ? Ou parce que vous le cachez aux députés, et donc aux Français ? En ce début de quinquennat, nous avons le droit de connaître votre objectif.
Cinquième question : M. Macron et son gouvernement ont-ils défini une politique de naturalisation ? Au cours des cinq dernières années, le nombre d'acquisitions de la nationalité française a augmenté de 24 %, ce qui résulte d'une politique dont nous avons débattu avec le ministre de l'intérieur d'alors, Manuel Valls. En 2016, 120 000 étrangers sont devenus Français.
Envisagez-vous de faciliter davantage encore l'accès à la nationalité française ? Ne faudrait-il pas plutôt assumer une conception exigeante de l'assimilation – il ne s'agit pas d'un gros mot mais d'un terme que l'on trouve dans le code civil – et par conséquent mieux vérifier que les étrangers aspirant à devenir Français en remplissent les conditions, notamment la maîtrise de la langue française et le respect de nos lois ?