Quelques mots pour nous remettre en mémoire la réalité de la situation des cheminots. Au 31 décembre 2019, il ne restait plus, au sein du groupe public ferroviaire SNCF, que 123 997 cheminots du cadre permanent et, si les suppressions d'emplois se sont multipliées depuis plusieurs années, la réforme de 2018 a accéléré ce processus. En l'espace d'un an seulement, ce sont 3 445 emplois de cheminots au statut qui ont été supprimés. Il s'agit là d'une véritable politique de casse et d'attrition de notre système de retraite, conduite depuis des années, qui dégrade le ratio entre retraités et cotisants et explique le déficit du régime.
Si, comme nos voisins allemands, souvent cités dans cet hémicycle, nous retrouvions une ambition pour le rail à la hauteur de la contribution qu'il peut apporter à la lutte contre le réchauffement climatique, nous n'assisterions pas au développement de la sous-traitance, à la fermeture de lignes et de guichets, à l'abandon du fret ferroviaire, et donc aux suppressions d'emplois – bien au contraire. L'État a donc une forte part de responsabilité dans le déficit démographique du régime des cheminots.
Cette remarque étant faite, la réforme que vous proposez ne résoudra en rien l'équation financière. Le nombre de cheminots au statut étant appelé à diminuer avant la fin des recrutements au statut, le nombre de cheminots retraités demain sera de toute façon beaucoup plus faible.
Ce qui vous motive est uniquement le désir de mettre à bas un symbole des conquêtes sociales, d'aligner vers le bas les régimes de retraite et de détricoter les acquis obtenus par les syndicats au fil des décennies passées. Il s'agit de faire table rase des avantages sociaux sous toutes leurs formes, pour précariser, fragiliser et décourager une main-d'oeuvre toujours plus malléable.
Nous pensons, au contraire, que le régime spécial des cheminots a vocation à être étendu à l'ensemble de la branche ferroviaire et que ceux qui exercent un métier dont la pénibilité est avérée doivent pouvoir continuer à bénéficier d'une retraite à taux plein à 55 ans. C'est dans cette optique que nous avançons la proposition d'un droit universel au départ anticipé à 55 ans pour tous les métiers pénibles, y compris dans le privé.