« La grandeur de l'homme est grande en ce qu'il se connaît misérable », nous a appris Blaise Pascal. En utilisant des dizaines de milliers de pauvres migrants comme instruments de pression, en les mettant délibérément en mouvement vers la frontière grecque, le président turc nous montre une des faces les plus sombres de notre humanité. Aujourd'hui, la frontière européenne se situe à Kastani, au nord de la Grèce. C'est là que l'Europe doit enfin déployer ses moyens et témoigner de sa solidarité. Devant le drame humanitaire qui se déroule, la crise migratoire qui se profile et les interrogations sécuritaires qui se posent, les Européens ne peuvent plus se payer de mots. Car à trop attendre, nous risquons fort de voir se multiplier dans le fleuve Evros les décès de nouveaux petits Aylan Kurdi.
Dans cette affaire comme dans d'autres, l'Europe s'est montrée dispersée, indécise, sujette à la procrastination ; notre communauté internationale s'est trouvée prise au piège de ses nombreuses contradictions. Nous attendons que l'Europe fasse front commun car il y va de notre sécurité mais aussi de la vie d'hommes, de femmes et d'enfants pris en otage d'un chantage migratoire inacceptable.
Dès lors, monsieur le ministre de l'Europe et des affaires étrangères, pouvez-vous nous présenter la feuille de route que vous proposerez au conseil extraordinaire du 6 mars à Zagreb ? Quelle sera la nature du soutien que la France instaurera vis-à-vis de la Grèce ? Quels seront les moyens dévolus à la mission Frontex ? Quel message la France, à travers l'Europe, adressera-t-elle à la Turquie ? Enfin, quel regard portez-vous sur l'accord migratoire conclu entre l'Union européenne et la Turquie en 2016 ? Quelles nouvelles pistes de partenariat explorez-vous ? Gageons qu'après le Brexit et en pleine impasse budgétaire, l'Europe pourra restaurer son unité – une unité durable et paisible – autour de cette cause commune.