Madame la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation, 111 universités et écoles, 278 laboratoires, 7 instituts universitaires de technologie, 145 revues scientifiques, 16 sociétés savantes… et la liste est encore longue : le monde universitaire est en lutte depuis plus de trois mois contre la dégradation générale des conditions de l'enseignement supérieur et de la recherche, au point d'organiser une journée « Facs et labos à l'arrêt » le 5 mars prochain.
Laissez-moi rappeler le contexte : une politique systématique d'assèchement des crédits de la recherche censée être compensée par des financements sur projet, qui suscitent une compétition accrue ; un recours croissant aux recrutements par voie contractuelle ; une évaluation administrative permanente et chronophage à tous les niveaux et à tous les échelons de toutes les structures ; une réforme des retraites qui réduira significativement les pensions.
Le projet de loi de programmation pluriannuelle de la recherche se fait désirer ; c'est peu dire que les attentes sont grandes. Or les rapports préparatoires nous inquiètent, car ils assignent des d'objectifs de compétitivité et de performance, au détriment des valeurs d'indépendance et de liberté qui nous paraissent pourtant fondatrices de la recherche. Autrement dit, ce sont les objectifs d'une loi inégalitaire, le président-directeur général du Centre national de la recherche scientifique ayant récemment appelé de ses voeux une loi « darwinienne ».
En effet, la généralisation du financement sur projet au profit de quelques sites dits d'excellence renforcerait la concurrence et les inégalités entre établissements et entre chercheurs. Dans la même logique, la création de nouveaux contrats de travail dérogatoires et la remise en cause profonde du statut d'enseignant-chercheur entraîneraient une précarisation accrue du milieu de la recherche.
Pouvez-vous nous assurer, madame la ministre, que le projet de loi de programmation pluriannuelle de la recherche, qui sera examiné très prochainement, sera le grand texte ambitieux et vertueux tant attendu ? Plus précisément, permettra-t-il enfin un investissement massif dans la recherche, à hauteur de 3 % du PIB, et la reconnaissance de nos chercheurs par une revalorisation de toutes les rémunérations ?