Soulignons encore une fois que nous n'avons pas conçu l'objet de notre rapport comme s'appliquant seulement au Sahel. Si cette région est aujourd'hui l'épicentre de nos efforts en matière militaire, ainsi qu'en matière d'aide au développement, nous nous sommes attachés à identifier des méthodes qui pourraient s'appliquer à d'autres théâtres de crise, sous réserve bien sûr d'adaptations au contexte local. En outre, si le Sahel est souvent présenté comme le flanc sud de la défense de la France métropolitaine, nos outre-mer s'inscrivent dans d'autres contextes géographiques qui ont eux aussi leurs facteurs de crise dans le champ du continuum entre sécurité et développement.
Cette idée du continuum mérite d'ailleurs que l'on s'y arrête. Les écarts de développement peuvent difficilement être vus comme un moteur de nos guerres classiques, clausewitziennes, dont les ressorts sont d'ordre bien plus politiques. C'est plutôt dans l'analyse de crises d'un autre type que s'impose l'idée d'un tel continuum. Ce n'est d'ailleurs pas un hasard si cette idée a fait l'objet de travaux de recherche et de doctrine de plus en plus nombreux depuis une vingtaine d'années environ, c'est-à-dire depuis que les Occidentaux interviennent surtout dans des conflits qui s'éloignent du type habituel de guerre que sont les affrontements ouverts entre États. Cette idée du continuum trouve toute sa pertinence dans l'analyse de ces crises nouvelles, de ces guerres asymétriques, que le livre blanc de 2013 regroupait sous l'appellation de « risques de la faiblesse » pour les distinguer des menaces de la force.