Intervention de Sylvain Waserman

Réunion du mercredi 4 mars 2020 à 9h35
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSylvain Waserman :

Nous sommes nombreux à considérer que la protection des lanceurs d'alerte devient un véritable marqueur démocratique et même un pilier de notre démocratie, au même titre que la liberté de la presse. Le rapport que j'ai rédigé et fait voter m'a permis de confronter et de croiser les regards de différents acteurs et de comparer les situations des différents pays pour y observer un certain nombre de bonnes pratiques. Votre proposition de loi a le mérite de mettre le sujet « sur la table » suffisamment tôt pour permettre de répondre à une ambition que nous sommes nombreux à partager – la ministre de la Justice, le Défenseur des droits et sa secrétaire générale, ainsi que les milieux associatifs –, celle de réaliser une surtransposition ambitieuse, pour que le droit français progresse et devienne une référence en matière de protection des lanceurs d'alerte. Cette volonté est profondément ancrée chez beaucoup d'entre nous, au sein de différents groupes politiques.

Il faut, selon moi, distinguer trois catégories de propositions au sein de vos textes.

Il y a, d'abord, les transpositions qui ne soulèvent pas de problème particulier et qui peuvent être adoptées.

D'autres, en revanche, nécessitent davantage de coconstruction. De ce point de vue, je considère qu'il s'agit de textes d'appel : s'agissant notamment des préconisations de la Maison des lanceurs d'alerte ou de la Commission nationale de la déontologie et des alertes en matière de santé publique et d'environnement, mais aussi des recommandations du Défenseur des droits et de la comparaison entre les différents pays européens, il nous reste beaucoup de travail à accomplir et vous avez le mérite de donner l'impulsion.

Enfin, votre proposition comporte aussi des éléments à réviser et des manques, en particulier sur l'anonymat et sur le statut des lanceurs d'alerte, qui constitue une question fondamentale. En droit, le lanceur d'alerte ne sait qu'il l'est qu'au bout de plusieurs années, alors que sa vie a été complètement détruite par la pression subie et les procédures mises en oeuvre pour le bâillonner, lorsque le juge finit par dire qu'il avait raison. Je ne suis pas tout à fait convaincu par les solutions que vous proposez ; nous devons répondre à la question de savoir comment identifier plus rapidement les individus relevant du statut de lanceur d'alerte et leur fournir la protection à laquelle ils ont droit. La création d'une autorité indépendante chargée de gérer ce problème me semble constituer une piste intéressante.

Il s'agit donc d'un véritable rendez-vous parlementaire, et nous prouverons notre valeur ajoutée si nous arrivons à travailler de manière transpartisane pour parvenir, avant la fin de l'année 2021, à un projet de loi qui rassemble la quasi-totalité de nos groupes politiques. Le sujet en vaut la peine, et je trouverais très intéressant que, sur la base de votre proposition, nous puissions mener à bien ce débat. À titre personnel, je pense que l'idéal serait de procéder avec votre proposition de loi comme pour un amendement d'appel, donc de la retirer au dernier moment au profit d'un groupe de travail véritablement transpartisan, associant l'ensemble des groupes politiques à des travaux qui débuteraient immédiatement. En effet, n'en voter qu'un petit bout risquerait d'engendrer de la frustration. De simples amendements ne remplaceront pas la coconstruction nécessaire qu'il faut entamer avec la société civile – certains de vos amendements en témoignent – et qui prendra plusieurs mois. Nous souhaitons être associés en amont et de manière innovante à la construction de cette loi.

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