Monsieur le Premier ministre, le 14 mars, le ministre des solidarités et de la santé a dressé dans un arrêté la longue liste des établissements ne pouvant plus accueillir du public. Dans le même arrêté, il a établi la liste des activités qui, faisant exception, sont autorisées. Un cran au-dessus, le Président de la République a lancé un appel à la population : « Si vous voulez nous aider, il faut rester chez vous. » Pourtant, le 18 mars, la ministre du travail s'est inquiétée d'un recours, prétendument abusif selon elle, au chômage partiel, et le ministre de l'économie et des finances a exhorté tous les salariés des entreprises qu'il a qualifiées d'essentielles à se rendre au travail. Or il n'a jamais été indiqué dans les arrêtés ce qui relevait des activités essentielles.
Ces injonctions contradictoires créent de la confusion et méritent des précisions. Dans certaines entreprises, par exemple dans l'industrie automobile, la mobilisation des syndicats a permis une mise à l'arrêt de l'activité. Leurs salariés peuvent donc désormais se confiner, sans qu'aucun préjudice ne soit porté aux intérêts de la nation. Une question se pose donc : qui décide de ce qui est essentiel ou non ? Ce sujet ne saurait être tranché uniquement par une poignée de membres de l'exécutif.
La situation sanitaire requiert une large mobilisation humaine et sociale : les travailleurs doivent se réunir dans les lieux de production pour en débattre dans les meilleures conditions sanitaires ; la communauté scientifique, les groupes politiques et, surtout, les salariés, doivent être associés. Une fois définies les activités essentielles, il faut garantir la protection des travailleurs, en association avec les principaux intéressés. Je pense notamment aux éboueurs d'Otus, dans mon département de Seine-Saint-Denis, qui ont exercé hier leur droit de retrait car ils n'avaient ni masques, ni moyen de se laver correctement les mains.
Monsieur le Premier ministre, comment le périmètre des activités essentielles est-il défini ? Accepteriez-vous d'associer à cette définition d'autres parties, comme les syndicats ou la communauté scientifique ? Enfin, comment comptez-vous assurer la protection de nos héros, qu'ils soient en blouse blanche, en bleu de travail ou en gilet fluorescent ?