Je veux m'exprimer, comme vous le devinez, en soutien de la position de mon ami Pierre Dharréville et du groupe GDR. Non, monsieur le rapporteur général, je ne crois pas que la BCE ait tiré les leçons de 2008 ni de la crise grecque. J'admets volontiers que M. Draghi a pris la bonne décision en injectant – contre l'avis de nombre de banquiers centraux européens, notamment allemands – des liquidités et en rachetant des titres de dette. Il est certain que cette intervention nous a protégés de la récession qui était imminente. Cependant, le mode d'exécution doit nous faire réfléchir. Je le redis : on a injecté, en l'espace d'un peu plus d'un an, l'équivalent de la richesse produite annuellement par la France, au rythme de 85 milliards d'euros par mois. Pourtant, il n'y a pas eu trace de ce que cela aurait dû produire : de l'inflation. Pourquoi ? Parce que tout cet argent est reparti dans la sphère financière et non dans l'économie qu'on appelle « réelle » – j'y mets des guillemets parce que je sais que beaucoup en mettent – ou productive. Le seul effet de cette intervention a donc été de maintenir la stabilité du système bancaire, ce qui n'est déjà pas si mal.
Vous venez de nous dire que ce système est stable et robuste, grâce à l'application des nouvelles mesures prudentielles. Je fais remarquer, pour mémoire, qu'il y a eu un débat dans cet hémicycle pour empêcher l'application des mesures Bâle III. En attendant, puisque le système est robuste, à quoi bon continuer de racheter des titres de dette des États sur le marché secondaire ? Pourquoi ne pas prêter de l'argent directement aux États ? C'est une décision qui est aussi hétérodoxe que l'a été celle d'acheter sur le marché secondaire. Ce système donne un résultat assez incroyable puisque les titres de dette rachetés de cette manière produisent des résultats pour la BCE, aux frais des États nationaux. Tout cela est un peu absurde. Certes, l'argent est ensuite à nouveau réparti, mais au terme d'un circuit d'une incroyable longueur, là où l'intervention directe permettrait de financer directement l'économie. Je crois donc que mon camarade Pierre Dharréville a raison.