Intervention de Stanislas Guerini

Séance en hémicycle du samedi 21 mars 2020 à 9h30
Urgence face à l'épidémie de covid-19 — Discussion générale commune

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaStanislas Guerini :

L'heure viendra de nouveau où, dans quelques semaines, nous pourrons nous serrer dans les bras. Le temps viendra où nous pourrons retrouver nos parents, nos grands-parents, nos familles et nos amis, les prendre dans nos bras et les embrasser. Il reviendra, le temps des bonheurs partagés et de la fraternité simple d'être ensemble.

Mais, aujourd'hui, la fraternité passe par l'éloignement. Les Français sont éloignés, mais ils sont unis dans l'épreuve : #restezchezvous. Ma génération a grandi en entendant : « Sortez couverts ! », et cela reste d'actualité. Mais, pour nos enfants, ce sera : « Restez chez vous. » Quand les lits de réanimation sont déjà bien occupés, sortir pour une autre raison qu'aller travailler ou faire des courses indispensables, c'est se mettre en danger et, surtout, mettre en danger les autres.

Nous devons faire preuve de responsabilité et d'union. Qu'importe, monsieur le président Mélenchon, qu'elle ne soit pas sacrée, si elle est concrète et quotidienne. Nous sommes dans une guerre sanitaire, et chacun d'entre nous peut être résistant à sa manière.

Quand on est soignant, être résistant, c'est sauver des vies. Quand on est confiné, être résistant, c'est respecter l'éloignement, qui sauve aussi des vies. Quand on est en activité, être résistant, c'est faire tourner le pays, aller travailler pour permettre aux Français de vivre et aux soignants de se concentrer sur leur mission essentielle. Et, quand on est parlementaire, quand on a l'honneur de représenter ses concitoyens et de les servir, et tout particulièrement aujourd'hui où nous avons la lourde responsabilité de représenter, à quelques-uns, tous les autres, à qui j'adresse une pensée fraternelle, la responsabilité, c'est de donner au Gouvernement les moyens d'agir rapidement. Je salue à cet égard les sénateurs et les députés de tous les bancs qui ont travaillé dans un esprit d'unité.

L'épreuve que nous traversons n'a pas de précédent récent. « Pestes et guerres trouvent les gens toujours aussi dépourvus », écrivait Camus. C'est précisément pour qu'ils ne restent pas dépourvus que le projet de loi propose un cadre juridique inédit, qui permettra, en réponse à l'urgence sanitaire, une action rapide et efficace. Les mesures de confinement et de réquisition prévues sont nécessaires, provisoires et proportionnées. C'est également pour qu'ils ne restent pas dépourvus que le texte propose de donner au Gouvernement les moyens d'adapter rapidement et provisoirement notre droit économique, social et financier afin que le pays tienne le choc.

Il s'agit donc d'un texte de confiance au Gouvernement, mais aussi de contrôle démocratique par le Parlement. Nous écrivons un droit qui n'existait pas, car les auteurs de notre droit n'avaient pas imaginé les circonstances que nous vivons aujourd'hui. Le projet de loi prend les dispositions nécessaires pour que toutes les énergies du pays soient consacrées à la lutte contre la crise sanitaire et économique. Tout ce qui n'y contribue pas doit être suspendu.

Le Président de la République a déjà annoncé qu'il suspendait les réformes ; il est aussi de notre responsabilité de suspendre le processus électoral des élections municipales en cours. Je salue donc la sage décision prise par le Sénat, qui a accepté de repousser la date d'entrée en fonction des conseils municipaux : c'était une décision difficile, mais responsable.

Je signale toutefois notre désaccord avec la chambre haute concernant la date de dépôt des listes pour le second tour. En effet, je ne crois pas que le temps soit aux tractations politiciennes, à la discussion d'alliances et de fusions pour un second tour dont nous espérons, sans pouvoir le garantir, qu'il aura lieu avant le 30 juin. Je suis convaincu que nos concitoyens ne comprendraient pas que les formations politiques consacrent leur énergie à mener cette discussion. Je regrette qu'un accord n'ait pu être trouvé plus tôt, mais je forme le voeu que nous aboutissions à un accord en commission mixte paritaire.

En ces jours difficiles, mes chers collègues, nous voyons parfois le pire – ceux qui volent des masques et qui devront être sanctionnés pour cela – , mais aussi le meilleur, avec des initiatives qui réchauffent le coeur, des dessins aux fenêtres, des plateformes de mise en relation organisant de nouvelles solidarités et des citoyens qui s'engagent chaque jour un peu plus.

Je voudrais donc consacrer le temps de parole qui me reste à applaudir avec vous celles et ceux qui sont en première ligne. Merci aux soignants qui sauvent des vies, merci à celles et à ceux qui vont travailler, grâce à qui il y a de l'eau dans nos robinets, grâce à qui nos déchets ne s'accumulent pas sur les paliers ou devant les maisons, grâce à qui les colis sont livrés, les magasins essentiels sont ouverts, les blouses des soignants sont lavées et désinfectées, grâce à qui le pays tient bon. Merci à elles, merci à eux. C'est cela qui doit rester : la fraternité et l'esprit de responsabilité.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.