Nous n'allons pas voter en faveur de ce qui nous est proposé, non en raison de votre personne, monsieur le Premier ministre, ni même de l'idée que nous nous faisons de votre action – nous sommes certains que vous faites pour le mieux – , mais parce que nous ne partageons ni vos diagnostics ni le système d'action que vous avez choisi. On voit bien que vous êtes aujourd'hui le bouc émissaire de confort de toutes sortes de gens, et d'abord dans votre propre majorité. Ce n'est pas notre état d'esprit : notre état d'esprit est de discuter les contenus, les faits d'une manière rationnelle parce que nous croyons que c'est la raison qui pourra nous tirer des difficultés dans lesquelles la patrie se débat. Vous n'êtes pas, au demeurant, le responsable en première ligne des diagnostics erronés.
En première ligne, comment oublier que le 24 janvier Mme Agnès Buzyn, de triste mémoire pour l'hôpital public, déclarait à propos de l'épidémie : « Le risque d'importation de cas depuis Wuhan est modéré. Il est pratiquement nul depuis que la ville est isolée. Les risques de cas secondaires autour d'un cas importé sont très faibles et les risques de propagation du coronavirus aussi. » On pourrait lui faire porter la responsabilité de cette déclaration et de celle où elle prétendait vous avoir informé du danger, ce qui ne se voit pas dans celle que je viens de citer. Mais comment alors comprendre que, le 3 mars – le 3 mars ! – , le Président de la République déclare : « Il est encore trop tôt pour dire si la France passera au stade de l'épidémie. »
Quant aux masques, tout le monde convient à présent qu'ils sont indispensables et font en quelque sorte partie des instruments barrières élémentaires. Vous dites vous-même avec raison, monsieur le Premier ministre, qu'il faudra en faire porter dans les transports en commun, mais il ne sert à rien de répéter aux gens qu'il ne faut pas prendre le métro pour le plaisir, car ils sont fort rares ceux qui sont dans ce cas ! Je vous invite à aller voir comment ça se passe sur la ligne 13.