Intervention de Jean-Christophe Lagarde

Séance en hémicycle du mardi 28 avril 2020 à 15h00
Déclaration du gouvernement relative à la stratégie nationale du plan de déconfinement dans le cadre de la lutte contre l'épidémie de covid-19 suivie d'un débat et d'un vote

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Christophe Lagarde :

Difficile d'apprécier, en quelques minutes, le plan très large que vous avez présenté. Je soulignerai d'abord que les députés du groupe UDI, Agir et indépendants partagent l'idée selon laquelle il faut choisir entre déconfinement et effondrement. En réalité, ce choix n'en est pas un : il faut déconfiner, la question étant de savoir comment.

Votre intervention comporte, me semble-t-il, des éléments positifs et des bonnes nouvelles. J'ai d'abord noté qu'il n'était pas certain que le déconfinement interviendrait le 11 mai et que vous le conditionniez au respect de plusieurs critères : le nombre de nouveau cas ; l'état des services d'urgence ; la reconstitution des stocks de matériel et de médicaments, mais également du capital humain, notamment dans les départements et les territoires les plus éprouvés ; et la capacité en matière de tests, indispensable pour améliorer le déconfinement le 11 mai.

J'estime toutefois que vous avez oublié de mentionner la disponibilité des masques – parce qu'ils ne seront pas disponibles en même temps sur tout le territoire. Les collectivités locales en ayant toutes commandé simultanément, elles ne les recevront pas toutes en même temps et ne pourront donc pas garantir la protection nécessaire à chacun. Vous avez clairement affirmé le caractère essentiel des masques. Je vous en remercie, en soulignant tout de même que personne, me semble-t-il, n'a jamais contesté le choix de les réserver aux soignants. Je regrette qu'on n'ait pas simplement expliqué aux Français que, dès lors que nous n'avions pas suffisamment de masques, les soignants étaient prioritaires, parce que, s'ils mourraient, plus personne n'aurait pu nous soigner. Tous les Français l'auraient compris, et la confiance de la population s'en serait trouvée renforcée.

Pour assurer que ces critères soient respectés, il faudra que les élus puissent en juger eux-mêmes. Il y va de leur responsabilité, davantage d'ailleurs que pour les préfets, lesquels fournissent un travail remarquable mais ne rendent pas de comptes à la population.

Le deuxième point positif réside dans le fait de procéder par étapes successives de trois semaines. Nous verrons comment s'applique le critère des départements verts ou rouges – je ne suis pas sûr qu'il faille attendre trois semaines pour chaque décision en la matière – , mais il est bon qu'on progresse par étapes et non d'un seul bloc.

J'ai également relevé plusieurs contradictions, peut-être liées à des incompréhensions ou à des incomplétudes. Vous évoquez d'abord une territorialisation du déconfinement, mais le ministre de l'éducation nationale indique que toutes les écoles doivent rouvrir en même temps.

Vous annoncez ensuite que les plages resteront fermées partout alors que, dans certains territoires où le virus n'a quasiment pas circulé, je ne pense pas qu'on soit plus en danger sur une plage que dans les médiathèques dont vous souhaitez permettre l'ouverture – même si j'imagine que des limites seront fixées.

Vous indiquez que l'accès aux crèches sera limité à dix enfants par établissement. Je n'ai pas très bien compris ce point – j'imagine que les prochains jours nous permettront d'y voir plus clair. Surtout, je n'ai pas compris pourquoi vous choisissez – à raison – de demander que les crèches accueillent en priorité les familles monoparentales et les enfants dont les parents sont obligés de travailler, sans étendre cette exigence aux écoles maternelles où, entre nous, les règles de distanciation sociale seront strictement impossibles à appliquer. Je vous ai interrogé sur ce point lors de précédentes réunions et je le fais à nouveau : les maires qui refuseront d'ouvrir des écoles maternelles se verront-ils obligés de le faire par les préfets, et, si oui, qui en portera la responsabilité pénale ?

Je constate également que vous ne mentionnez pas la nécessité de tester massivement les adultes intervenant en milieu scolaire – enseignants, personnels des collectivités locales, voire salariés des sociétés qui y interviennent. C'est ce qu'on a fait avant le confinement : on fermait les écoles lorsqu'un adulte était contaminé. Il me semble préférable d'effectuer ces tests en amont, pour éviter qu'une infection menace le personnel des écoles et les enfants.

Il vous appartiendra par ailleurs d'éclaircir certaines incertitudes. Vous avez annoncé, par exemple, que les parcs et jardins ne pourraient rouvrir que dans les départements verts. Or, très franchement, dans les départements qui resteront rouges – sans jeu de mots, s'agissant de la Seine-Saint-Denis – ,

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