Monsieur le Premier ministre, êtes-vous étonné que les deux tiers des Français soient opposés à la réouverture des écoles le 11 mai alors que nous vivons une crise sanitaire sans précédent ? Nous, pas.
Ce délai, c'est un président solitaire et omnipotent qui l'a décidé, contre l'avis des scientifiques – peut-être même contre le vôtre. Depuis, c'est le branle-bas pour se conformer à une injonction irréaliste qui se moque des familles, des maires et des enseignants.
Cette annonce précipitée a donc dû être adoucie en invoquant le volontariat. L'école de la République sur la base du volontariat ! À chaque jour son concept ! Désormais, c'est la lutte contre le décrochage scolaire sur la base du volontariat… Dans quel salon doré a-t-on élaboré cet argumentaire ?
Les maires, à qui l'État a repassé les plats grâce à cette notion hypocrite de volontariat, sont seuls face aux inquiétudes de la population sur les conséquences possibles du Covid chez l'enfant. Ils reçoivent, une semaine avant le début du déconfinement, un protocole complet certes mais technocratique, inapplicable, qui se résume ainsi : poser l'enfant sur une chaise, immobile, à l'écart des copains et des jeux, avec obligation de se laver les mains tous les quarts d'heure…. Bref, le contraire de l'humanité dont font preuve quotidiennement nos ATSEM, les agents territoriaux spécialisés des écoles maternelles, ainsi que les accompagnants des élèves en situation de handicap ! « L'incarcération, ce n'est pas l'école qu'on veut pour nos enfants », me disait hier un maire.
Faute d'une véritable concertation en amont, les conditions ne sont pas réunies pour une reprise à la date imaginée par le Président de la République, et vous le savez. Beaucoup de questions attendent toujours des réponses : qu'en sera-t-il de la cantine, du transport scolaire, de la désinfection, de l'accueil périscolaire ? Qui va faire quoi chaque jour, comment, avec quels moyens pour les collectivités ? Il est encore temps d'y répondre par un soutien concret du terrain. Il est encore temps de décider une validation formelle par les représentants de l'État de chaque réouverture d'école.
Monsieur le Premier ministre, le crédit de l'État s'est fracassé sur les masques et sur l'hôpital, évitons qu'il ne sombre dans l'abîme face à l'école de la République !