Intervention de Laurence Gayte

Séance en hémicycle du jeudi 9 novembre 2017 à 15h00
Projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 - projet de loi de finances pour 2018 — Écologie développement et mobilité durables

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaLaurence Gayte, rapporteure pour avis de la commission des affaires étrangères :

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, chers collègues, lundi dernier, la COP23 s'est ouverte à Bonn. La communauté internationale est de nouveau au chevet de la planète et le constat est inquiétant. Les études et les conclusions convergent et s'accumulent : atteindre l'objectif de l'Accord de Paris de limiter à deux degrés Celsius l'augmentation des températures terrestres relèvera bientôt de l'impossible.

L'urgence à agir est plus que jamais absolue. Le monde doit opérer, dans la toute prochaine décennie, une transition énergétique inédite, en s'appuyant, notamment, sur la baisse des prix des énergies renouvelables. En ce qui concerne la politique intérieure, le Gouvernement a présenté son plan climat le 6 juillet dernier. L'objectif est d'atteindre la neutralité carbone à l'horizon 2050. De plus, à travers les deux initiatives que sont le sommet climat du 12 décembre prochain et le projet de pacte mondial pour l'environnement, notre pays reste très mobilisé dans la lutte contre le dérèglement climatique.

Dans cette perspective, la commission des affaires étrangères, dans le domaine de la diplomatie environnementale, s'est donc centrée cette année sur le climat. Elle a naturellement émis un avis favorable au vote du budget de votre ministère. De plus, elle a souhaité faire quatre séries de propositions en appui des positions très fortes et très claires du Président de la République et du Gouvernement sur le climat.

Notre première recommandation concerne la mise en oeuvre de l'Accord de Paris. Celle-ci doit être la plus exigeante possible. La COP23 doit valoriser l'idée que l'année 2018 sera l'année du lancement de la révision des contributions des pays membres sur le climat, qui se déploiera d'ici à 2020. Tel doit être le sens du dialogue facilitateur prévu par l'Accord de Paris. En effet, d'après le GIEC, si l'on fait le compte des engagements des pays, on ne parvient pas à l'objectif des deux degrés et on se situe, au mieux, vers les trois degrés. Or, il faut tout tenter pour parvenir à rester sous les deux degrés, voire sous le degré et demi.

Il faut également être à la hauteur des enjeux sur les modalités d'application de l'Accord de Paris, notamment sur la transparence, d'autant que la technique satellitaire permet maintenant d'estimer la concentration de CO2 dans l'atmosphère en des points précis de la surface terrestre.

Il faut enfin être clair sur l'engagement financier en faveur des pays du Sud. Les 100 milliards de dollars par an, prévus depuis la conférence de Copenhague en 2009, font partie de la relation de confiance. La France s'est engagée sur 5 milliards par an. C'est le minimum, car les besoins estimés de la transition énergétique sont immenses et représentent plus de 1 000 milliards d'investissements par an, pendant plusieurs années, pour la seule Europe.

Notre deuxième recommandation concerne l'Union européenne. L'exigence s'impose dans les négociations sur les directives de mise en oeuvre de la stratégie énergie-climat 2030. Il convient aussi de traiter la question du prix du carbone. L'objectif est de fixer un niveau crédible, de 25 à 30 euros la tonne. Le signal doit être sans ambiguïté pour les investisseurs et les conditions économiques de la décarbonation doivent être réunies. Nous appuyons donc la proposition du Président Macron sur la taxe carbone aux frontières. Il faut garantir la compétitivité de nos entreprises et éviter les fuites de carbone.

Par ailleurs, les deux grandes politiques de l'Union européenne, la politique agricole commune et la politique de cohésion doivent être verdies pour la prochaine période de programmation budgétaire. La décennie 2020 sera, en effet, stratégique pour la transition énergétique et pour la mutation en profondeur de notre système productif vers la décarbonation.

Notre troisième priorité concerne les engagements commerciaux. Ils doivent être cohérents avec les objectifs climatiques. On le voit avec l'Accord économique et commercial global – CETA – , signé avec le Canada avant l'Accord de Paris. Le plan d'action proposé par le Gouvernement et auquel certains parlementaires ont contribué, contient un volet environnemental important. Pour ce qui est des accords en cours de négociation ou envisagés par l'Union européenne, les objectifs de l'Accord de Paris doivent être inclus dans leurs futurs dispositifs. D'une manière générale, ces accords doivent servir de levier au verdissement du commerce mondial. Je pense aussi nécessaire de faire évoluer le secteur du transport maritime international en ce sens.

Notre quatrième recommandation est la mise en place d'une politique de recherche ambitieuse et visible, aux niveaux national et européen, dans trois domaines clés : le stockage de l'électricité, le captage du CO2, la ville durable et l'économie circulaire.

On le voit, le chemin à parcourir pour bâtir un monde porteur d'un modèle économique transformé et sobre en carbone est encore long, mais indispensable. Il est urgent pour la France et l'Europe de s'y engager, si on ne veut pas hypothéquer l'avenir de nos enfants.

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