Intervention de Zivka Park

Séance en hémicycle du jeudi 9 novembre 2017 à 15h00
Projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 - projet de loi de finances pour 2018 — Écologie développement et mobilité durables

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaZivka Park, rapporteure pour avis de la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire :

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, chers collègues, le transport aérien constitue un secteur à part entière et un support de l'activité économique de notre pays, qui contribue au rayonnement de la France dans le monde.

L'objet du budget annexe de la Direction générale de l'aviation civile – DGAC – est de garantir, dans un cadre unifié, la sécurité et la sûreté du transport aérien, en prenant en compte les enjeux de développement durable. Le secteur de l'aviation civile connaît un contexte favorable, avec une hausse continue du trafic aérien dans le monde et en Europe. Le budget annexe de la DGAC a dégagé un excédent d'exploitation en 2016, il en dégagera un autre en 2017 et probablement aussi en 2018. C'est une administration qui ne coûte rien à l'État, puisqu'elle s'autofinance grâce aux taxes et redevances qu'elle perçoit. Le projet de budget annexe « Contrôle et exploitation aériens » pour 2018 confirme que la Direction générale de l'aviation civile respecte une trajectoire de rétablissement de ses comptes et poursuit son désendettement, tout en confortant sa capacité à investir. La situation financière de ce budget annexe est donc saine – il importe de le souligner.

À y regarder de plus près, toutefois, les sujets de préoccupation ne manquent pas parmi les acteurs français du secteur. S'agissant d'Air France-KLM, d'abord, la direction du groupe fait état d'une situation qui n'est pas satisfaisante. Si la compagnie recommence depuis deux ans à générer des bénéfices, elle est dans une situation beaucoup moins florissante que ses rivales. Et si Air France-KLM réalise des bénéfices, c'est davantage grâce à KLM et aux activités industrielles d'Air France que pour son activité aérienne, qui constitue pourtant le coeur de son métier.

Si Air France se trouve dans une situation plus compliquée que ses rivales, ce n'est pas seulement en raison d'un certain nombre de rigidités internes, c'est aussi parce que le niveau des charges sociales, des taxes et des redevances appliquées en France est particulièrement élevé. Il est primordial de veiller à ce que les acteurs économiques nationaux bénéficient des meilleures conditions pour leur développement et qu'ils ne soient pas victimes d'une concurrence déloyale. Depuis l'an 2000, le pavillon français – au delà d'Air France – a ainsi perdu 17 % de parts de marché, passant de 60 à 43 % des vols au départ du territoire national.

J'aimerais dire un mot à présent sur la taxe de solidarité, la fameuse « taxe Chirac », qui a été créée à partir d'une idée généreuse, puisqu'il s'agissait de faire financer par le transport aérien une partie de l'aide au développement. Cette taxe devait être internationale mais, en réalité, elle concerne essentiellement la France et sa compagnie nationale, première contributrice de cet impôt peu équitable. Cette taxe, qui devait être mondiale, n'est appliquée que par neuf pays, dont six pays africains parmi les plus pauvres de la planète. Et la plupart d'entre eux exonèrent la classe économique ou les vols intérieurs, ce que la France ne fait pas. Notre pays participe ainsi aux deux tiers de la collecte des fonds, et Air France est la première compagnie contributrice, avec plus de 60 millions d'euros par an.

En 2015, déjà, le rapport du député Bruno Le Roux établissait ce constat et, dans un rapport de septembre 2016, la Cour des comptes écrivait que « ce mécanisme de solidarité, sans lien avec le domaine aérien, a perdu de son idéal ». C'était, selon la Cour, la confirmation que « l'exemple de la France n'est pas suivi et conduit à pénaliser le transport aérien français ». J'appelle donc votre attention sur la nécessité de remettre en cause cette contribution peu équitable, qui pénalise le transport aérien français. Nous savons maintenant qu'aucun autre pays, à part ceux que j'ai évoqués, n'a l'intention d'instaurer cette taxe qui existe chez nous depuis douze ans.

La situation de la société Aéroports de Paris – ADP – prête également à interrogations. A priori, la société se porte bien et les investissements vont bon train, aussi bien à Orly qu'à Roissy. Le CDG Express est enfin lancé, ce dont nous nous réjouissons. Mais j'insiste sur le fait que son développement ne doit pas se faire au détriment de la modernisation du réseau existant, ou au prix d'une remise en question de la réalisation de la ligne 17 du Grand Paris Express, qui doit relier Roissy et Paris d'ici à 2024, en passant par Gonesse. Des interrogations persistent également sur le niveau élevé des taxes et redevances à Roissy par rapport aux concurrents que sont Francfort et Amsterdam. Une certaine modération en matière tarifaire serait de nature à améliorer la compétitivité de la plateforme de Roissy-CDG, même si nous avons bien conscience que cela se ferait au détriment des dividendes perçus par l'État actionnaire.

D'importantes échéances sont à venir, puisqu'une réflexion est lancée sur une éventuelle cession de parts de la société ADP, qui ne pourrait se faire que par l'intermédiaire d'une loi. Par ailleurs, dans quelques semaines vous sera remis le rapport relatif au devenir du projet d'aéroport du Grand Ouest, et le Gouvernement devra alors se prononcer.

Je voudrais, pour finir, rappeler que la maîtrise des nuisances sonores est devenue impérative si l'on veut que la population, et notamment les riverains d'aéroports, continue à accepter la croissance durable et soutenue du trafic aérien. Tout en saluant les mesures d'insonorisation engagées depuis des années, je souhaiterais relancer la réflexion relative à une éventuelle péréquation de la taxe sur les nuisances sonores aériennes – TNSA – entre les aéroports. En effet, si certains aéroports de province ont déjà pratiquement achevé l'insonorisation des habitations riveraines, la tâche est plus ardue et plus coûteuse aux abords des aéroports parisiens, car ils sont enserrés dans un tissu urbain particulièrement dense.

Qu'une partie des recettes de la TNSA recouvrée dans d'autres régions contribue à l'insonorisation des riverains de Roissy mériterait de faire l'objet d'une réflexion, compte tenu de l'apport de cette plateforme à l'ensemble du rayonnement aérien de notre pays et des retombées économiques qu'elle engendre.

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