La crise du Covid-19 nous place dans une situation tout à fait inédite. Je veux d'abord manifester toute notre sympathie aux familles durement touchées par le virus et tout notre soutien aux personnels qui sont « au front » dans des conditions si difficiles. La responsabilité des pouvoirs publics est de protéger la population, ce qui suppose d'anticiper à chaque étape et de déployer des mesures d'urgence. Il faut à la fois empêcher la propagation du virus, soigner les malades et satisfaire les besoins de tous. C'est là que le débat démocratique s'ouvre.
Pour commencer, il y a la question de la pénurie de masques et de gel hydroalcoolique dans les hôpitaux, qui rend leur situation tout à fait alarmante. Nous ne comprenons pas pourquoi la réserve de volontaires ne vient pas leur prêter main forte alors qu'ils sont déjà en état de saturation.
Une autre question est celle des besoins essentiels, dont nous n'avons sans doute pas la même appréciation. Mme la ministre du travail Muriel Pénicaud a encouragé les entreprises à travailler, ce qui serait à ses yeux une preuve de civisme. Selon nous, seul le travail indispensable à la vie doit être autorisé. Nous ne comprenons pas comment des entreprises du bâtiment et travaux publics (BTP) ou des sociétés comme Amazon peuvent continuer à mobiliser leurs employés alors qu'il n'est pas possible d'organiser des obsèques, même réduites au minimum. L'échelle de valeurs pose singulièrement problème.
L'humanité doit être plus que jamais aux commandes. Nous sommes sans doute en train de prendre la mesure des méfaits d'un système économique qui fait primer le profit. Aucun prétendu impératif de compétitivité ou de rentabilité ne doit prévaloir sur les objectifs sanitaires et sur la vie. Déterminer quelles activités sont nécessaires relève du débat démocratique et, dans chaque entreprise, de la décision de ceux qui produisent ces richesses, s'ils bénéficient de conditions décentes.
En toutes circonstances, nous estimons que le partage des richesses et l'entraide sont les valeurs cardinales pour dégager des réponses à la hauteur du défi qui nous est lancé. C'est pourquoi nous sommes très inquiets de la possibilité laissée, dans le texte, aux entreprises de décompter le temps de confinement sur les journées de réduction de temps de travail (RTT), de remettre en cause les vacances d'été ou encore d'en finir avec les 35 heures hebdomadaires pour une durée potentiellement indéterminée.
Enfin, ce projet de loi consacre un état d'urgence sanitaire. Nous comprenons les besoins de l'État d'agir vite et fort. Je rappelle toutefois que, même pendant la Première Guerre mondiale, la séparation des pouvoirs n'a pas été abrogée. Il faut maintenir les processus démocratiques. Nous avons déposé des amendements en ce sens.