Comme le rappelait Mme Batho, je n'ai pas inventé cette définition : je me suis appuyé sur les recommandations de la CNCDH, qui nous suggère ces précisions pour protéger les libertés publiques, pour éviter qu'on applique l'état d'urgence sanitaire dans n'importe quelles conditions. À titre d'exemple, la loi de 1955 relative à l'état d'urgence était extrêmement vague : il a fallu qu'on l'encadre et qu'on lui donne une base constitutionnelle.
Tout le monde est d'accord sur les critères de la « nature » et de la « gravité » figurant à l'alinéa 11. Reste l'« ampleur », car le phénomène peut être très grave mais circonscrit, ne concerner que quelques dizaines de personnes : dans un tel cas de figure, compte tenu de la rédaction actuelle, l'état d'urgence sanitaire pourrait être déclaré. C'est pourquoi Delphine Batho et moi-même proposons d'ajouter ce critère. Par ailleurs, même si la condition tenant à l'ampleur est satisfaite, il n'est pas nécessairement utile de déclencher l'état d'urgence sanitaire si le système de santé est capable de faire face. Nous proposons donc d'ajouter le critère du « caractère non maîtrisé par le système médical ».
Notre objectif est qu'on ne puisse pas utiliser les dispositions qui seront contenues dans le décret à d'autres fins que celles prévues initialement. Si quelqu'un conteste le décret, il s'appuiera sur la définition qu'on a retenue de l'état de catastrophe sanitaire. La rédaction proposée me paraît plus prudente, car l'ampleur n'est pas contenue dans la gravité – le phénomène peut entraîner un taux de mortalité élevé, mais au sein d'une petite minorité de la population, et être très localisé, par exemple dans les DOM-TOM où, on l'a vu, des épidémies ont frappé seulement certaines îles. Il me paraît donc prudent d'encadrer cette disposition, comme on l'a fait pour la loi de 1955, qui a été élaborée, rappelons-le, pendant la guerre d'Algérie.