Ma collègue, Mathilde Panot l'a évoqué tout à l'heure, l'alinéa 8 vise à permettre à certaines entreprises « de déroger aux règles d'ordre public et aux stipulations conventionnelles relatives à la durée du travail, au repos hebdomadaire et au repos dominical. » C'est pour nous un grave problème. Ces dispositions seront introduites sans la moindre concertation, ni dans le cadre du dialogue social avec les organisations syndicales, ni entre les salariés eux-mêmes. Or c'est d'abord cette voix que l'on doit entendre dans un moment où l'on demande à une partie de la population de faire de grands efforts.
Il a été dit que ces mesures ne seraient que temporaires et liées à l'urgence. Nous avons pourtant l'expérience de mesures temporaires, pouvant, comme l'état d'urgence, être prorogées, qui ont ensuite été introduites dans la loi, car elles étaient finalement bien pratiques ; le temps de la reconstruction économique promettant d'être long, elles risquent de devenir la norme. Le caractère temporaire n'est donc en rien une garantie.
Par ailleurs, nous le disons depuis le début de ce débat, il y a un avant et un après crise, y compris dans la manière dont nous considérons l'utilité sociale et économique de certains secteurs. Il faut commencer à repenser, de manière radicale, la place des salariés, la part, aujourd'hui cruciale, qu'ils ont, pour nous permettre de faire face à cette situation, et la façon d'organiser la répartition des ressources en fonction de ceux qui produisent la ressource vitale, qui nous permettra de tenir dans la durée. Cette réflexion détermine la façon dont nous pourrons entamer la reconstruction par la suite. Si, dès le départ, vous introduisez des dispositifs qui contraindront et restreindront les droits sociaux des premières personnes concernées, vous décidez que rien ne changera dans le monde d'après. Cela est problématique, non seulement pour les personnes concernées, mais aussi pour la société dans son ensemble.