On ne peut pas dire que les masques manquent, dès lors que nous sommes en mesure d'appliquer la doctrine que nous nous sommes fixée et qui consiste à en doter les personnels en contact direct et prolongé avec la population pénale. Néanmoins, leur nombre est insuffisant pour que nous puissions en doter l'ensemble des personnels et les détenus qui circulent dans les établissements. Mais nous avons poursuivi nos acquisitions et développé très rapidement nos capacités de production en détention de sorte qu'il devrait être possible de les équiper tous à très court terme.
La décision de suspendre les parloirs est sans doute un élément déterminant des troubles qui ont eu lieu dans certains établissements et qui se sont concentrés dans les cinq jours qui ont suivi cette décision. Que certains établissements aient été plus touchés que d'autres s'explique par l'impact variable de l'incertitude quant aux mesures exceptionnelles de libération anticipée, au délai nécessaire pour appliquer les mesures de maintien des liens familiaux, notamment pour préparer techniquement les mesures que nous avons prises pour les contacts par téléphone, et à cela s'ajoute la réduction du trafic en détention.
Un hebdomadaire a annoncé que 130 détenus radicalisés avaient été libérés. C'est faux ! Ce nombre est celui des détenus suivis au titre de la radicalisation par le service national de renseignement pénitentiaire qui sont éligibles aux remises de peine supplémentaires exceptionnelles ou aux assignations à domicile. Seulement 11 d'entre eux sont sortis, pour l'essentiel sur décision d'un juge d'application des peines, avec des réductions de peine de quelques jours. Les mesures concernant les prévenus impliqués dans l'attentat de Strasbourg n'ont rien à voir avec l'ordonnance du 25 mars, qui ne concerne que les condamnés. Ces prévenus ont été remis en liberté, dans le cadre de l'instruction, sur décision de l'autorité judiciaire et, pour l'un au moins, pour des raisons médicales sans lien avec l'actuelle épidémie.
Hier après-midi, nous dénombrions 9 923 détenus de moins que le 16 mars. Le taux d'occupation est de 103 % dans l'ensemble du parc pénitentiaire et de 116 % – contre 140 % au début de la crise – dans les maisons d'arrêt. L'impact sur la surpopulation dans nos maisons d'arrêt est donc majeur.
J'ai indiqué dans une note les conditions dans lesquelles les avocats continuent d'avoir accès à leurs clients en détention, soit par téléphone, soit grâce au maintien, dans des conditions sanitaires drastiques, des « parloirs avocats ». La question soulevée devant le Conseil d'État concernait davantage les conditions d'exercice des droits de la défense devant les juridictions.
Enfin, aucune pénurie de gel n'a été signalée, ni par les établissements pénitentiaires, ni par les SPIP. Le taux d'absentéisme, qui oscille entre 20 % et 28 % selon les jours – contre 13 % habituellement –, n'a pas fortement affecté le fonctionnement des établissements. Nous avons réorienté une partie des agents libérés d'autres tâches, notamment des extractions judiciaires, vers la gestion de la détention.