France urbaine représente les trente plus grosses villes de France. Sa commission Sécurité se réunit chaque semaine depuis le début de la crise.
Nous pouvons nous féliciter qu'une grande majorité de villes dispose d'une police municipale, complément indispensable à la police nationale. À Saint-Étienne, nous avons signé une convention avec cette dernière afin de définir nos champs d'action respectifs. Plusieurs villes ont le sentiment que les rapports entre police nationale et polices municipales se distendent et qu'un transfert de charge s'opère de la première vers les secondes. Nous avons alerté le ministre de l'Intérieur sur ce désengagement, qui a conduit à la résurgence d'incivilités et du trafic de drogue, qui avaient disparu au début du confinement. La police nationale semble moins réactive qu'avant la crise : elle n'est pas à effectif complet et elle est particulièrement sollicitée pour faire respecter le confinement.
En outre, les décisions nationales – couvre-feu, fermeture des marchés – sont appliquées de manière très hétérogène par les préfets. Cela met les maires en difficulté et crée des tensions car les habitants, ne comprennent pas pourquoi les directives du Président de la République et des ministres ne sont pas appliquées partout de la même façon.
Les maires ont équipé leur police municipale de gel hydroalcoolique et de masques avant que la police nationale en soit dotée. Cette inégalité a aussi entraîné des tensions.
France urbaine a proposé au ministre des solutions constructives. Nous vivons l'absence de réponse comme un manque de considération. Nous avions proposé d'ouvrir les écoles, non seulement aux enfants des personnels soignants, mais aussi à ceux des personnels de la police nationale, de la gendarmerie, des polices municipales, également en première ligne. L'absence de réponse a abouti à un traitement hétérogène.
Nous regrettons également les décisions prises sans concertation avec les polices municipales : ainsi, personne ne s'est soucié de savoir comment elles pourraient contrôler les autorisations de sortie numérique. J'ai d'excellentes relations avec le préfet de la Loire, mais il est parfois en difficulté, recevant la même semaine ordres et contrordres…
Pour détenir une arme, les policiers municipaux doivent justifier d'un certain nombre d'heures de tir. Or les entraînements sont suspendus. La responsabilité des maires est donc engagée. Nous n'avons pas eu de réponse ministérielle sur ce point non plus. De même, le flou autour de la formation pour détenir des bombes lacrymogènes n'a pas été dissipé.
Dans le cadre de la préparation du rapport des députés Fauvergue et Thourot et du Livre blanc sur la sécurité intérieure, nous avions émis des propositions : nous regrettons l'absence de retour, comme le fait que le groupe de travail « partenariats et continuum de sécurité » n'ait pas associé les maires à ses travaux.
Alors que le Parlement s'est prononcé pour une délégation aux maires, la fermeture administrative des établissements reste du seul ressort des préfets, La consultation des fichiers d'immatriculation des véhicules par les polices municipales n'a toujours pas été généralisée – c'est un handicap au quotidien. Quand un policier municipal arrête quelqu'un sur la voie publique et veut contrôler son identité, il doit téléphoner à un officier de police judiciaire : si ce dernier n'est pas disponible, la personne peut partir…
Les agents de sécurité privée sont particulièrement présents à l'entrée des magasins. D'autres questions vont se poser avec le déconfinement : s'il est rendu obligatoire, qui va contrôler le port du masque dans les transports en commun et verbaliser les contrevenants ? Les polices municipales, avec l'appui d'agents de sécurité embauchés par les délégataires de transports ?
Des réponses à ces questions amélioreraient sensiblement le continuum de sécurité, tout en préservant le partage entre les missions régaliennes de sécurité publique de la police nationale et celles relatives à la tranquillité publique des polices municipales.