Concernant les médicaments d'utilisation importante, notamment en service de réanimation, je rappelle quelle est notre stratégie. D'abord, il s'agit de disposer d'une vision exhaustive de tous les stocks des principales molécules nécessaires aux malades en réanimation : ceux qui sont disponibles auprès des entreprises pharmaceutiques, qui sont tenues par la législation française d'avoir sur le territoire français des stocks conséquents de molécules d'intérêt thérapeutique majeur, ceux qui existent chez les grossistes répartiteurs, et ceux qui sont conservés dans les pharmacies internes des établissements hospitaliers publics et privés. C'est un travail qui est mené de front à la fois par la cellule de crise du ministère des solidarités et de la santé et par les ARS.
Ensuite, nous mettons en oeuvre une orientation générale des médicaments à visée réanimatoire vers les régions qui font face à la vague épidémique, notamment le Grand Est, l'Île-de-France et la Bourgogne-Franche-Comté. Au sein des régions, la répartition est laissée au soin des industriels parce que leur logistique est parfaitement opérationnelle. Enfin, au sein des ARS, des agents sont chargés d'appeler chaque hôpital pour connaître ses besoins prévisionnels à J+1, J+5, J+10, et une cellule de veille et d'alerte peut être contactée par tous les établissements qui, sur le point de manquer de médicaments, ont besoin d'être réapprovisionnés en urgence en quelques heures.
Parallèlement à cette organisation, et pour faire face à l'explosion de la demande et de la consommation de médicaments à visée réanimatoire, l'autre volet de notre action consiste à activer toutes les chaînes de production française, mais également à rechercher toutes les voies d'approvisionnement à l'étranger, auprès des principaux laboratoires pharmaceutiques qui fabriquent et commercialisent de tels médicaments.
Joachim Son-Forget m'interrogeait sur la thérapeutique de l'hydroxychloroquine : un décret a été pris qui permet son utilisation dans des conditions certes très strictes et très encadrées, mais qui correspondent aux recommandations de toutes les sociétés savantes avec lesquelles le Haut Conseil de la santé publique s'est concerté. En outre, plusieurs études cliniques sont en cours sur le territoire national, et une grande étude multicentrique européenne, intitulée Discovery, teste actuellement cinq branches thérapeutiques, c'est-à-dire non seulement l'hydroxychloroquine mais également d'autres molécules antivirales comme le remdésivir. Plusieurs centaines de patients sont déjà inclus, et j'attends des résultats intermédiaires de cette étude dans les prochains jours. Une étude a également commencé pour tester la combinaison hydroxychloroquine-azithromycine versus hydroxychloroquine seule ; une autre a été entamée à Montpellier sur des malades peu sévères, en soins ambulatoires, avant tout signe d'aggravation, pour observer si ce type de molécules est susceptible de préserver l'état de santé des patients. D'autres études sont à venir.
Joachim Son-Forget est médecin. Il sait donc que, pour prescrire un médicament, il faut disposer d'un minimum de preuves, démontrées scientifiquement, de son efficacité, en France ou ailleurs dans le monde. L'Italie, qui a autorisé les pharmaciens à prescrire ce médicament, s'est trouvée en pénurie pour des patients atteints de maladies chroniques, qui ont besoin d'un tel traitement. Croyez-moi, s'il existe un médicament, celui-ci ou un autre, capable d'améliorer l'état de santé des Français, nous mettrons tout en oeuvre pour le rendre disponible dans les meilleures conditions et, surtout, les meilleurs délais. Tout est déjà fait pour que les études de protocoles cliniques aboutissent.
L'azithromycine est un autre médicament intéressant, car, sans entrer dans le détail, certaines de ses propriétés permettent de réguler la sécrétion de cytokines, qui peut avoir des conséquences pulmonaires graves dans la maladie.
Enfin, je précise que l'enjeu principal des tests est celui de la sérologie. La recherche et développement à l'échelle de la planète sont en cours pour la développer et l'industrialiser au plus vite, afin de pouvoir indiquer à un malade s'il a été infecté et s'il est immunisé, grâce à la recherche d'anticorps. Si ce dispositif existait, avec une sensibilité et une spécificité satisfaisantes, nous pourrions sans problème en faire bénéficier le plus grand nombre de Français, puisque nous aurions seulement besoin d'une prise de sang et non d'une plateforme PCR. Nous attendons ces tests sérologiques dans quelques jours à quelques semaines. L'ensemble de la recherche mondiale se concentre sur ce point, qui constitue un enjeu majeur, notamment dans la perspective du déconfinement, pour indiquer aux Français s'ils ont été contaminés ou non.