Intervention de Marie Guévenoux

Séance en hémicycle du jeudi 7 mai 2020 à 15h00
Prorogation de l'état d'urgence sanitaire — Article 1er

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarie Guévenoux, rapporteure de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République :

Avec ces amendements, dont certains visent à rétablir le texte dans la rédaction que le Sénat nous avait transmise, nous revenons sur un débat que nous avons déjà eu tout à l'heure. J'aimerais néanmoins y répondre de manière précise, afin que l'on se comprenne bien.

Plusieurs de ces amendements visent à supprimer la responsabilité pénale en cas de faute grave et caractérisée alors que l'auteur des faits ne pouvait ignorer qu'il exposait autrui à un risque d'une particulière gravité. Que les choses soient claires : ce cas de figure correspond, non à celui d'un maire qui n'aurait pas pu prendre toutes les précautions nécessaires face à l'épidémie faute de disposer des moyens adéquats, mais à celui d'un décideur qui aurait, par exemple, réuni un grand nombre de personnes dans le cadre d'une réunion publique et refusé – je dis bien refusé – de prendre les mesures prophylactiques nécessaires. Voilà le problème que posent ces amendements et, comme cela a été dit tout à l'heure, la rédaction adoptée par le Sénat.

Je redis aussi que certains amendements présentent en outre un risque de rupture d'égalité en limitant la portée du dispositif aux actes pris pendant l'état d'urgence sanitaire. Concrètement, ce dispositif ne s'appliquerait pas à un maire d'Alsace ayant pris des mesures avant la déclaration de l'état d'urgence sanitaire alors qu'un maire de Bretagne agissant dans le cadre de ce dernier serait, lui, concerné. Cela pose problème.

Enfin, l'adoption de tels amendements modifierait l'architecture du régime de responsabilité pénale en créant des catégories différentes.

S'agissant de la question des connaissances scientifiques disponibles, qui a fait l'objet d'échanges en commission, je répète que c'est au juge qu'il reviendra d'apprécier leur état au moment des faits, ainsi que le degré d'information de la personne concernée. Le juge n'appréciera pas de la même façon les connaissances que l'on attend d'un directeur d'ARS et celles que l'on attend d'un maire ou d'un chef d'entreprise. Néanmoins, toute responsabilité se fonde sur une connaissance non seulement des règles de droit, mais également des règles de prudence ou de sécurité.

Pour toutes ces raisons, j'émets un avis défavorable sur l'ensemble des amendements en discussion commune.

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