Schématiquement, ce que l'on donne au vélo, on l'enlève à la voiture. Je n'y peux pas grand-chose : c'est ainsi que les choses ont été imaginées par nos prédécesseurs, en leurs grades et qualités respectifs. Par définition, cet argent n'est donc pas créé, il est pris à la voiture. Il est important d'avoir cela en tête lors du vote, mesdames et messieurs les députés.
Vous m'avez demandé, madame Batho, pourquoi le Gouvernement prenait cette décision dans le projet de loi de finances, sans attendre l'issue des Assises de la mobilité. C'est justement pour les préparer au mieux que le Gouvernement a décidé de venir ce soir avec une proposition. Certains dispositifs doivent connaître une transition, nous en sommes convaincus, mais il aurait été curieux de décider, au moment même ou nous organisons ces assises, de tout suspendre brutalement à partir du 1er janvier. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement a déposé l'amendement que je finirai par défendre dans quelques instants.
Vous m'avez interrogé sur la pratique du stop and go. Je suis un grand défenseur de la stabilité, mais je suis également persuadé que les outils dont nous parlons sont avant tout des mécanismes de transition. C'est un peu, toutes proportions gardées, comme la garantie de prix de rachat de l'électricité en matière d'énergies renouvelables : une fois qu'un modèle économique a été trouvé, il est légitime que les pouvoirs publics, l'État, se retirent progressivement, et avec eux l'argent du contribuable. Il en va de même pour les voitures électriques, par exemple.
Pourquoi un dispositif sur les vélos à assistance électrique et non pas sur les vélos classiques ? Tout simplement parce que les premiers coûtent encore cher. Cette aide permet de diminuer le coût pour l'acheteur ; elle permet aussi aux fabricants de trouver des outils de compétitivité pour nourrir un marché. C'est tout l'enjeu de la structuration de la filière. Nous formons tous le voeu, je le crois, de voir l'investissement de l'État en la matière refluer une fois que l'offre aura rencontré la demande et que les prix auront diminué. Ce sera de toute façon le cas lorsque la transition écologique et énergétique sera accomplie, ce que nous souhaitons tous, puisque nous aurons alors changé d'économie. J'étais dans les Hauts-de-France il y a quelques heures à peine : les modèles vertueux sur lesquels doit s'appuyer la troisième révolution industrielle doivent aussi relever du secteur privé, et ne pas toujours solliciter l'argent public. On peut, je le crois, tous s'accorder sur ce point.
Par ailleurs, vous demandez pourquoi notre préoccupation de la catégorie sociale à laquelle appartiennent les bénéficiaires de la prime s'exprime plus particulièrement au sujet du vélo. C'est tout simplement parce dans d'autres domaines, le Gouvernement a d'ores et déjà apporté des réponses : en matière de logement, on peut évoquer la transformation du CITE en prime à partir de 2019, qui soulagera la trésorerie des ménages ayant besoin d'effectuer des travaux chez eux, mais aussi le chèque énergie ou les certificats d'économie d'énergie ; et concernant la voiture, citons l'universalisation des primes de transition pour les personnes imposables ou non, avec une majoration pour ces dernières, de façon à les porter à hauteur de 2 000 euros. Restait la question du vélo, demeurée en suspens. Avec l'amendement que le Gouvernement dépose ce soir, nous achevons le processus, de la façon la moins mauvaise possible, en trouvant une solution pour les mobilités douces.
Vous m'avez enfin interrogé sur les inégalités territoriales. Je dirais qu'en la matière, une transition peut en cacher une autre ! Le mécanisme créé doit susciter chez nos concitoyens un intérêt envers des façons différentes de se déplacer. Dans le même temps, et c'est un élu local qui vous le dit, il faut que les collectivités territoriales exercent les compétences que le législateur lui a confiées.
Nous sommes tous attachés au principe constitutionnel de libre administration des collectivités territoriales : nous n'allons donc pas rendre obligatoires les dispositifs destinés à accompagner nos concitoyens dans la transition écologique et énergétique. Mais il y a des élus dont c'est le rôle, au sein des conseils régionaux notamment. Nous pourrons en reparler le moment venu. Tout le monde doit prendre ses responsabilités ; l'État n'a pas vocation à être de tous les combats.
Je le redis : la conversion des véhicules thermiques est un énorme sujet écologique – cela a été suffisamment dit ici – , mais aussi social. Nombreux sont les endroits en France où il faut une voiture pour aller travailler ou vivre une vie de famille normale. Qu'on le déplore ou non, c'est ainsi. C'est sur ce sujet essentiel que l'État doit se concentrer.
Monsieur Orphelin, j'ai répondu à vos préoccupations sur le stop and go et sur les inégalités territoriales. Vous craignez par ailleurs que l'on n'ait pas suffisamment avancé sur l'indemnité kilométrique vélo au terme des Assises de la mobilité. Je tiens néanmoins à vous rassurer en rappelant que ces assises seront animées par Élisabeth Borne sous le contrôle de Nicolas Hulot. Or, comme vous, sans doute, je fais confiance au ministre d'État pour trouver une solution sur cette question.