Intervention de Daniel Labaronne

Séance en hémicycle du vendredi 10 novembre 2017 à 9h30
Projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 - projet de loi de finances pour 2018 — Conseil et contrôle de l'État

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDaniel Labaronne, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, la mission « Conseil et contrôle de l'État » est composée de quatre programmes : « Conseil d'État et autres juridictions administratives », « Cour des comptes et autres juridictions financières », « Haut Conseil des finances publiques » et « Conseil économique, social et environnemental ».

Les crédits affectés à ces quatre programmes s'établissent à 678 millions d'euros en autorisations d'engagement et 663 millions d'euros en crédits de paiement. Cela représente une hausse de 1,03 % et de 2,16 % respectivement. Cette progression très modérée est en continuité avec les lois de finances des années précédentes. De manière structurelle, les dépenses de personnel constituent l'essentiel des crédits demandés : 85,3 %.

Pour réaliser mon rapport, j'ai eu le plaisir de rencontrer et d'auditionner : le vice-président du Conseil d'État, le président du Conseil économique, social et environnemental et le Premier président de la Cour des comptes. J'ai pu constater que les juridictions administratives et financières, et plus récemment le CESE, ont mené une gestion rigoureuse au cours des dernières années pour contenir l'évolution globale des ressources alors même que les activités et compétences des programmes sont en augmentation.

Le programme relatif au Conseil d'État comporte la seule hausse significative du plafond d'emplois de la mission : l'augmentation de ces effectifs est en grande majorité absorbée par le renforcement de la Cour nationale du droit d'asile. Cela est directement lié à l'objectif du Gouvernement, qui sera sous peu traduit dans la loi, de réduire le délai d'instruction d'une demande d'asile à six mois. Ce renforcement de la CNDA est pour moi un motif de satisfaction.

Au-delà de l'évolution de ses dépenses de personnel, le Conseil d'État doit faire face à une hausse structurelle de l'activité des juridictions administratives due à la croissance du contentieux. Dans la fabrique de la loi, nous devons faire attention à ne pas multiplier les sources possibles de contentieux qui alimentent ensuite les procédures que les juridictions administratives doivent alors examiner. Nous devons par conséquent simplifier le droit et veiller à son efficacité.

Concernant la Cour des comptes, il faut remarquer que les dépenses de personnel sont contenues et que le plafond d'emploi est stable depuis plusieurs années, alors même que les juridictions financières sont tenues d'assumer des missions croissantes de certification et de contrôle. Face à ces missions croissantes, il faudra sans doute conduire une réflexion sur l'évolution du plafond d'emplois de la Cour des comptes.

Vous nous proposez par ailleurs, par ce projet de loi de finances, une hausse de 3,3 % des ressources du programme consacré au Haut Conseil des finances publiques. Cette instance de supervision indépendante doit porter une appréciation sur la cohérence des objectifs annuels présentés par le Gouvernement par rapport à la trajectoire pluriannuelle de solde structurel. Il me paraît important, dans ce cadre, que les appréciations portées sur la crédibilité des objectifs soient éclairées par des éléments précis relatifs aux dépenses. Je propose donc d'étudier la possibilité – sous réserve d'un examen des implications juridiques de cette proposition – d'habiliter expressément le Haut Conseil à rendre un avis plus détaillé sur l'évolution des dépenses du budget de l'État.

Par ailleurs, le Haut Conseil comme la Cour des comptes ont une véritable mission d'assistance au Parlement : il nous appartient, au sein des assemblées parlementaires, de nous saisir de cette ressource d'expertise. Nous devrions réfléchir à la création d'un office parlementaire commun aux deux chambres qui jouerait un rôle similaire au Public accounts committee dont dispose la Chambre des communes du Royaume-Uni.

Certes, des organismes d'évaluation existent déjà, mais notre Parlement n'est pas doté d'un comité d'expertise propre à servir de relais avec les instances dont je viens de parler, et à centraliser et arbitrer les demandes d'études pour lesquelles ces organismes peuvent être sollicités. Cet office pourrait, par exemple, contribuer à l'élaboration d'études d'impact en amont de certains amendements parlementaires dans le cadre de la discussion du projet de loi de finances, quand le calendrier le permet. Le coeur de sa mission devrait toutefois être le contrôle de l'exécution du budget : cela permettrait de redonner une importance décisive à la loi de règlement.

Enfin, le programme relatif au Conseil économique, social et environnemental s'inscrit dans une certaine continuité, tant du point de vue du niveau des crédits que de l'évolution des dépenses et des effectifs. De réels efforts de rationalisation dans l'emploi des ressources du CESE ont été notés dans la période récente.

Cependant, des interrogations s'expriment quant au rôle du CESE dans l'avenir. Nous devrions connaître dans les mois à venir le contenu de la réforme appelée de ses voeux par le Président de la République, qui souhaite faire de cette instance « le carrefour des consultations publiques » et « une véritable chambre du futur » – pour reprendre ses mots.

Je recommande parallèlement d'avancer sur le droit de pétition et d'envisager la dématérialisation de la procédure de saisine du CESE par voie de pétition citoyenne ; il faudrait pour cela réexaminer les conditions de mise en oeuvre de cette procédure, fixées par l'ordonnance organique du 29 décembre 1958.

Pour finir je souhaite remercier M. Ahui, administrateur des services de l'Assemblée nationale, qui a travaillé avec moi sur ce rapport, ainsi que ma collaboratrice, Mme Roux.

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