Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, la transformation en profondeur de notre pays passe par des réformes économiques, fiscales et sociales qui doivent être amplifiées par des investissements massifs dans des secteurs stratégiques.
C'est tout le sens du grand plan d'investissement de 57 milliards d'euros présenté par le Premier ministre le 25 septembre dernier et dont 10 milliards proviendront du troisième programme d'investissements d'avenir, financé à partir de 2018, qui fait l'objet cette année, pour la première fois, d'un rapport de la commission des affaires économiques.
Tout d'abord, je tiens à souligner plusieurs évolutions positives du PIA 3 par rapport à ses deux prédécesseurs.
Le PIA 3 bénéficie d'une mission et de programmes spécifiques, stables dans le temps, et dont les crédits de paiement vont désormais être votés chaque année.
Le PIA doit faire partie des outils permettant aux petites entreprises qui innovent de croître rapidement et de former des entreprises de taille intermédiaire performantes, compétitives à l'international et très créatrices d'emplois. Je suis donc satisfaite que le PIA 3 contienne un volet régionalisé de 500 millions d'euros de crédits qui permettront d'accompagner les régions dans le développement de projets innovants, ancrés dans les territoires. Cette évolution est essentielle : ce sont les régions qui connaissent le tissu des TPE-PME innovantes, à l'échelle desquelles les projets soutenus seront donc plus adaptés.
Jusqu'à présent, en effet, les PME ont eu beaucoup de difficultés à accéder aux fonds des PIA 1 et 2, du fait des modalités des appels d'offres, pour lesquels les grands groupes sont plus armés. De ce point de vue, le PIA 3 prend bien davantage en considération le cas des PME, ce que le bleu budgétaire rappelle à plusieurs reprises ; mais il faudrait aussi que les PIA 1 et 2 s'ajustent, et ce dès à présent.
Il existe aujourd'hui un levier particulièrement efficace pour favoriser les écosystèmes d'innovation au sein desquels les PME sont fortement représentées : ce sont les pôles de compétitivité. Malheureusement, nous constatons que la labellisation de certains projets par ces pôles ne permet pas de faciliter l'accès aux jurys de sélection des fonds du PIA, lesquels privilégient plutôt les grandes entreprises, s'associant certes des PME, mais selon une logique de sous-traitance plus que de partenariat. C'est regrettable, car cela dissuade les TPE-PME de rechercher les crédits du PIA : elles craignent d'être dépossédées de leur propriété intellectuelle, de perdre leur autonomie, de gâcher trop de ressources dans l'ingénierie de projet sans bénéficier en retour de la plus-value de l'aide publique. Cela prouve que le PIA est aujourd'hui inadapté.
La situation de nos PME à l'international est largement perfectible. Je suis donc satisfaite que le PIA 3 soit doté d'un fonds pour l'internationalisation des entreprises, qui permettra de les soutenir dans l'acquisition de filiales à l'étranger. En effet, le PIA doit davantage mobiliser ses outils pour favoriser l'internationalisation de nos entreprises, dans le but d'en faire des ETI efficaces. Aujourd'hui, seules 31 % des PME exportent, quand c'est le cas de 70 % des ETI. Cependant, la dotation de 200 millions d'euros reste faible et ne permettra d'engager qu'une vingtaine d'opérations sur des tickets de 3 à 20 millions d'euros.
Le dernier point concerne l'évaluation parlementaire du PIA. Dans la préparation du rapport, j'ai été directement confrontée au peu de transparence de la gestion du PIA, notamment s'agissant des outils de contrôle auxquels le Parlement a accès. Nous l'avons évoqué en commission, monsieur le secrétaire d'État : le reporting trimestriel adressé par le Commissariat général à l'investissement est en fait un document uniquement comptable et financier, sans aucun élément d'évaluation des actions ni de prospection concernant les décaissements à venir et les réorientations du plan. De plus, les réponses du CGI au questionnaire budgétaire qui lui a été transmis se sont révélées très partielles, totalisant 12 pages quand mes collègues rapporteurs disposent de 50 à 80 pages de précisions utiles à leur mission. Il est indispensable que le CGI développe une culture d'évaluation. Il est vrai que les programmes en question nécessitent un suivi dans le temps long, mais l'ampleur des sommes en jeu ne permet pas d'échapper à une évaluation rigoureuse.
J'aimerais en conclusion, monsieur le secrétaire d'État, vous faire part de quelques recommandations.
Ne faudrait-il pas améliorer sensiblement l'exercice de reporting au Parlement auquel se prête le CGI, afin que le Parlement dispose véritablement des moyens de contrôle que la Constitution lui confie ?
Comment remédier au manque de transparence du CGI et des opérateurs concernant les données brutes et les tableaux de bord du PIA ?
Par ailleurs, il serait intéressant de réorienter une partie du PIA vers les pôles de compétitivité afin de soutenir ces derniers dans leur action de structuration des écosystèmes d'innovation.
Enfin, il paraît nécessaire d'accroître la simplification et la lisibilité des appels à projets du PIA afin de toucher un maximum de TPE-PME, notamment grâce à des dossiers de candidature brefs et des tickets d'entrée plus modestes.
Je donnerai néanmoins un avis favorable à l'adoption des crédits du PIA.
Je remercie les services de l'Assemblée, ainsi que mon collaborateur, d'avoir travaillé avec moi à l'élaboration du rapport.