Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mesdames, monsieur les rapporteurs, chers collègues, la question des moyens alloués à la justice dans notre pays est récurrente. Comme a pu le pointer le Conseil de l'Europe, la France se classe dans les derniers rangs des pays européens en termes de budget consacré à la justice. Eu égard aux cures d'austérité qui nous sont imposées, il y a malheureusement fort à parier que cette situation ne perdure.
Cela étant dit, l'augmentation du budget de la Cour nationale du droit d'asile de 2 millions d'euros sur l'exercice et la création de 51 équivalents temps plein sont une vraie bonne nouvelle dans le contexte de crise migratoire que connaît notre pays. Bien qu'elle soit loin d'être proportionnelle aux 30 % d'augmentation des recours à cette juridiction, nous espérons que cette hausse sera de nature à atteindre l'objectif de réduction à six mois du délai moyen de traitement des demandes d'asiles.
Sur le programme 165 « Conseil d'État et autres juridictions administratives », nous ne pouvons que déplorer le manque patent d'ambition en faveur de l'amélioration du fonctionnement de ces juridictions. On oublie trop souvent que derrière les chiffres des délais qui s'allongent, il y a des justiciables dont les droits sont bafoués, notamment en matière d'accès à une justice administrative efficace.
À titre d'exemple, j'ai exprimé en commission ma totale incompréhension face à la baisse de 3 % des crédits alloués au tribunal administratif de Cayenne, alors même que le nombre d'affaires qui y sont instruites a plus que doublé au cours des dix dernières années. J'entends l'argument de M. le secrétaire d'État Castaner, selon lequel la télétransmission connaît une croissance exponentielle outre-mer, mais il ne saurait me satisfaire, surtout quand on connaît la fracture numérique dont souffre la Guyane.
Le programme 126 « Conseil économique, social et environnemental » pose, lui aussi, de vraies questions. En effet, les missions actuellement attribuées au CESE justifient-elles le budget colossal qui est dédié à celui-ci et qui est sans cesse abondé à l'heure où l'on demande à chaque Français de faire toujours plus d'efforts et de sacrifices ? Je ne le crois pas.
Le Président de la République nous a annoncé lors du Congrès de juillet dernier son intention de réformer le CESE et, face à la crise de la représentation, l'idée d'une véritable troisième chambre citoyenne fait son chemin. Pourquoi pas ! La France réaliserait une première mondiale en matière de démocratie, et cette nouvelle chambre serait un formidable outil de réconciliation des citoyens avec la chose publique. Quoi qu'il en soit, nous n'avons plus les moyens d'attendre et il est urgent que cette réforme soit inscrite à l'ordre du jour de nos débats.
Le programme 340 « Haut Conseil des finances publiques » tire les conséquences de l'adoption du pacte de stabilité européen que nous n'avons pas cessé de dénoncer dans les rangs de la Gauche démocrate et républicaine. Si ce Haut Conseil ne dispose que d'un budget de 500 000 euros, son coût social est largement plus élevé dans la mesure où il découle d'un pacte qui enferme les pays signataires dans un carcan budgétaire, ne leur laissant pas d'autre choix que de mener en permanence des politiques d'austérité. Autant dire que l'existence même d'une telle instance pose de sérieuses questions au plan du respect des principes démocratiques et de la souveraineté budgétaire du Parlement.
Pour ce qui est du programme 308 « Protection des droits et libertés », on regrettera la baisse des crédits alloués au Défenseur des droits, dont je veux saluer ici la décision 2017-078 du 14 février 2017 dans laquelle il formule plusieurs recommandations pertinentes dans les domaines de la santé, de l'éducation, de la protection de l'enfance ou encore de l'accès aux services publics. Autant de thématiques pour lesquelles il a constaté les nombreuses défaillances administratives qui rendent difficiles, voire inopérantes, le principe d'égal accès aux droits et aux services publics en Guyane.
Par ailleurs, nous regrettons également que le Conseil supérieur de l'audiovisuel ne bénéficie d'aucun coup de pouce budgétaire, alors même qu'il est amené à jouer un rôle important et sûrement repensé, au moment où la parole raciste, xénophobe et homophobe se libère même à des heures de grande écoute.
Sur le programme 129 « Coordination du travail gouvernemental », nous nous posons la question de l'opportunité de la baisse de 18 % des crédits alloués au Commissariat général à la stratégie et à la prospective qui fait un gros travail d'évaluation des politiques publiques de façon indépendante et sérieuse, coordonnant les actions de plusieurs organismes tels que le Conseil d'analyse économique ou encore le Haut conseil de la famille, de l'enfance et de l'âge. Il est également dommage de baisser les crédits de la mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives, même si nous saluons la légère progression des fonds dédiés aux initiatives outre-mer, afin de nous permettre de mieux lutter contre les trafics de drogues en tous genres.
Monsieur le secrétaire d'État, les autres programmes des missions que nous examinons aujourd'hui n'appellent pas, de notre part, de commentaires particuliers, si ce n'est peut-être que nous regrettons, d'une part, la perte de vitesse du programme d'investissements d'avenir qui ne pourra compter dans sa troisième mouture que sur 10 milliards d'euros et, d'autre part, la hausse de 3 millions d'euros du budget de la Présidence de la République. Cela ne nous semble pas aller dans le sens de la réconciliation des contribuables avec leurs représentants.
Vous l'aurez compris, monsieur le secrétaire d'État, les députés de la Gauche démocrate et républicaine ne pourront pas vous soutenir sur ces missions qui souffrent du manque d'ambition qui caractérise, il faut bien l'avouer, le projet de loi de finances pour 2018 dans son ensemble.