Les chiffres donnent le tournis : des millions de masques commandés, stockés et à commander ont finalement brouillé la visibilité en matière de masques de protection des soignants. Plus qu'une question, c'est un témoignage que je voudrais apporter ici, un témoignage de l'intérieur de la machine – avec un grand M. Investie bénévolement dans l'ARS de Provence-Alpes-Côte d'Azur depuis le 15 mars – j'en remercie d'ailleurs son directeur général, M. Philippe De Mester, et toutes ses équipes de m'avoir accueillie et accompagnée dans leur établissement – , je voudrais témoigner de l'organisation logistique d'une région que sa proximité avec l'Italie ainsi que son port mondialisé et la population très âgée qui y vit mettaient en danger. Alors que les discours faisaient état de millions de masques, les stocks arrivaient de manière irrégulière dans le temps comme pour ce qui concernait les volumes. Pourtant la logistique, tant dans les GHT – les groupements hospitaliers de territoire – que dans les officines, s'est adaptée pour rendre les pénuries les plus courtes possibles et pour approvisionner les professions oubliées – je pense au secteur des pompes funèbres et aux collecteurs des DASRI, les déchets d'activités de soins à risques infectieux. L'Ordre national des pharmaciens a même créé, en PACA, une application, GoMask, pour rendre lisibles et visibles les stocks destinés aux soignants ; ce fut un grand succès.
Cependant, alors que l'on avait besoin de travailler à l'organisation locale avec les soignants, la pénurie à l'échelle du pays a ralenti les débats et placé les ARS et leurs délégations départementales en première ligne de la désolation des soignants et parfois de leur colère. Monsieur le ministre, une enquête parlementaire sera essentielle pour redonner de la consistance à la relation de confiance nécessaire entre les soignants et les agences chargées de l'organisation des soins dans les territoires. Des questions sur le contrôle des stocks, en qualité et en quantité, devront être posées, et les nouvelles dispositions de précaution devront inclure des phases de contrôle à chaque niveau de responsabilité des acteurs, comme les entreprises et les collectivités locales. Cela a sans doute manqué dans les préconisations du SGDSN – le secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale – de mai 2013, qui répartissaient les nouvelles responsabilités décentralisées.