… l'Allemagne quatre fois plus, et l'Autriche a annoncé vouloir tester 130 000 résidents et membres du personnel dans 900 maisons de retraite.
Certains membres du Gouvernement refusent aujourd'hui de voir l'évidence. Le défi n'est pas de tester les personnes présentant des symptômes, dont on sait déjà qu'elles devront rester confinées, mais plutôt d'identifier les porteurs sains, qui sont pourtant contagieux, voire, grâce à des tests sérologiques, les personnes qui ont pu développer des anticorps et qui sont vraisemblablement immunisées.
A contrario de ces principes clairs, le ministre des solidarités et de la santé a affirmé, le 25 avril, qu'« un dépistage tous azimuts de tout le monde dans une entreprise [… ], cela n'a pas de sens au niveau médical et scientifique », alors que quatre patients sur cinq infectés par le coronavirus seraient asymptomatiques selon le British Medical Journal. Le Président Emmanuel Macron a également affirmé, le 14 avril : « Nous n'allons pas tester toutes les Françaises et tous les Français, ça n'aurait aucun sens. »
Comment pouvez-vous nous expliquer aujourd'hui que, sans tests massifs, l'application StopCovid pourrait être efficace ? Ce débat n'a plus lieu d'être, étant donné que la condition sine qua non pour que cet outil numérique fonctionne n'est pas remplie : nous ne pratiquons pas assez de tests en France. Or, sans dépistage suffisant, cet outil ne servirait quasiment à rien.
Outre son impossible efficacité par manque de tests, il revient toujours au Gouvernement d'apporter la preuve scientifique qu'une telle application sera un atout décisif dans la lutte contre la pandémie.
Monsieur le secrétaire d'État, notre question est simple : à partir de quel pourcentage de la population connectée les résultats seront-ils probants ? De premières approximations estiment qu'entre 80 % et 100 % de la population devrait utiliser l'application pour qu'elle soit efficace, à condition, évidemment, qu'elle produise des données fiables. Or seulement 77 % de la population française possède un smartphone, et cette proportion est ramenée à 44 % chez les personnes de plus de 70 ans, qui sont pourtant parmi les plus vulnérables – sans parler des personnes qui ne savent pas activer le Bluetooth. Pour rappel, seulement 16 % de la population de Singapour a utilisé l'application équivalente, qui n'a pas empêché le recours au confinement.
D'autres questions restent en suspens.
Qu'en est-il de l'interopérabilité entre les solutions développées par les différents pays ? C'est un point crucial pour l'efficience du dispositif dans un contexte de réouverture prochaine des frontières, comme cela va être le cas dans mon département avec la Suisse et l'Italie.
En ce qui concerne le serveur central du protocole ROBERT, quelles données seront recueillies ? À quoi serviront ces données ? Permettront-elles d'identifier des clusters alors que les informations sont censées être anonymes ? Où ce serveur sera-t-il hébergé ?
Quel accompagnement pour les personnes qui ne maîtrisent pas bien la technologie ?
Où en sont les discussions avec les GAFAM ? Les rebondissements et l'échec de nos négociations sont aujourd'hui symptomatiques d'une incapacité d'agir et d'une absence de vision stratégique du Gouvernement sur les sujets technologiques. Ils sont aussi le reflet du retard pris par notre pays dans ce domaine.
Par ailleurs, l'application StopCovid suscite beaucoup d'inquiétudes quant au respect des libertés individuelles. Même si elle n'est pas obligatoire, elle pourrait facilement créer une pression sociale trop importante, et les personnes n'utilisant pas l'application risqueraient de ne plus pouvoir travailler ou accéder librement à certains lieux publics, rendant leur consentement non libre et donc nul.