Monsieur le Premier ministre, voici un mois, le Président de la République demandait étrangement aux acteurs de la culture d'« enfourcher le tigre » – expression enjambant allègrement les 45 milliards d'euros que pèse la culture du point de vue économique, et déplacée vis-à-vis des plus de 600 000 personnes qui font vivre ce secteur d'activité.
Pour nombre d'entre elles, notamment pour les gens du spectacle relevant du régime général, tels que les embauchés en contrat d'extra, les guides, les gens du catering, les hôtesses, les agents de sécurité – j'en oublie – , « enfourcher le tigre », ce sera surtout, après l'adoption par le Sénat, la semaine dernière, d'un amendement du Gouvernement, enfourcher le chômage. Si votre réforme de l'assurance chômage n'est pas abrogée d'ici au mois de septembre, l'indemnisation de ces 2 millions de salariés à emploi discontinu connaîtra une lourde dégradation.
« Enfourcher le tigre », pour les théâtres dits publics, c'est surtout enfourcher un système injuste, qui ne permet pas aux salariés embauchés sous contrat d'artiste intermittent d'accéder au chômage partiel. Enfin, « enfourcher le tigre », pour les intermittents du spectacle, c'est, en dépit du soulagement procuré par la prolongation de leur indemnisation jusqu'au 31 août 2021, et en l'absence d'année blanche, ne disposer que de huit ou dix mois pour faire ses heures, car nous savons tous que la culture fera partie des derniers secteurs d'activité à sortir du confinement.
Et que dire des interventions d'artistes, évoquées par le Président de la République, dans le cadre des « vacances apprenantes » ?