L'argent public, celui de nos impôts, doit servir à défendre les intérêts de la nation, et non pas ceux du marché et de la finance.
Voilà ce dont nous aurions aimé parler lors de ce printemps de l'évaluation. Or, dans un tel exercice, nos marges de manoeuvre sont bien faibles, quand le budget de la nation lui-même est soumis à l'approbation de la Commission européenne. C'est la vérité, et il faut le dire !
C'est aussi au printemps que la France, au nom du pacte de stabilité, a l'obligation de transmettre à Bruxelles nos projets de finances publiques, de dépenses et de croissance. À la fin de l'année, nous devons aussi envoyer à Bruxelles le budget de la France, en espérant obtenir une bonne note, si ce n'est même en croisant les doigts dans l'espoir de ne pas recevoir un coup de règle. Cette soumission du budget de la nation à la Commission européenne est tout à fait inacceptable. Où sont la souveraineté de la France et celle du Parlement dans les choix que nous voulons faire ?
Nous avons célébré, le 29 mai dernier, le quinzième anniversaire du référendum sur la constitution européenne, rejetée par 54,6 % des Français, référendum qui gravait dans le marbre d'un traité constitutionnel européen la perte de souveraineté de la France et la mise de notre pays sous tutelle de l'Europe et des marchés financiers.
Nous sommes de ceux qui ont toujours défendu l'indépendance de notre pays et la souveraineté de notre peuple, pour traduire tout simplement notre volonté de rester maîtres de nos choix politiques et budgétaires, sans subir les diktats des marchés financiers et des politiques d'austérité de la Commission européenne, ni les diktats d'autres pays. Avec d'autres dans notre pays, nous avons mené ce combat au nom des valeurs de liberté, d'égalité et de fraternité qui forment tout l'héritage de la Révolution française.
C'est la raison pour laquelle nous refusons toujours aujourd'hui l'abandon de nos prérogatives fondamentales, celles qui permettent à une nation d'adopter son propre budget, répondant aux attentes de ses citoyens, sans être obligée d'appliquer des réformes imposées par l'Union européenne ou d'autres politiques d'austérité, comme le prévoyait le traité constitutionnel de 2005.
C'est pourquoi nous disons qu'il serait temps que la France agisse en faveur d'une autre Europe, notamment en choisissant d'autres critères d'utilisation des richesses de notre pays et de l'Union européenne. La pandémie a exposé au grand jour les failles insupportables d'un système entièrement tourné vers le profit et la compétition. Ce modèle est incapable de répondre aux attentes sanitaires et sociales des peuples européens. Celui auquel nous aspirons suppose d'autres priorités, au service de l'homme et de la planète. C'est pourquoi nous répétons que ce n'est pas au peuple ni au monde du travail de payer la crise, y compris à travers une dette – en augmentation – qui a été contractée auprès des marchés financiers.
Nous serons donc très vigilants sur l'utilisation des deniers publics. Le calendrier du printemps de l'évaluation nous impose de rendre nos conclusions aujourd'hui, alors que nous sommes encore en plein coeur de la crise et qu'un nouveau projet de loi de finances rectificative a été présenté ce matin en conseil des ministres et à l'instant en commission des finances. Je tiens à souligner que dans ces PLFR qui s'enchaînent, nous, députés, ne disposons d'aucune marge de manoeuvre pour augmenter la dépense publique et créer une charge dans le budget : l'article 40 bride immanquablement le Parlement.
Nous ne pouvons ainsi que déplorer le manque de démocratie dans la gestion du budget. Au lieu de nous cantonner dans l'opposition, voyez-nous plutôt comme une composante de cette assemblée, qui représente une partie des convictions qui s'expriment dans le pays. Nous ne sommes pas dans l'opposition, nous sommes une force de proposition et nous voulons tout simplement exprimer ici le point de vue d'une partie de la population.
Comme je l'ai dit au début de mon intervention, nous ne pouvons que saluer les intentions du printemps de l'évaluation. Toutefois, nous lui adressons aussitôt, et c'est de saison, une appréciation en forme d'encouragement : « peut– nettement – mieux faire ». Le chemin à parcourir, à vrai dire, est encore long avant que non seulement cet exercice soit à la hauteur des attentes des Français, mais aussi qu'il accorde aux parlementaires un véritable pouvoir de contrôle, en respectant la pluralité de leurs voix.