Intervention de Patrick Hetzel

Séance en hémicycle du mercredi 10 juin 2020 à 15h00
Débat sur le rapport d'information de la commission des finances sur le printemps de l'évaluation consacré à l'évaluation des politiques publiques 2020

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPatrick Hetzel :

Je me concentrerai sur l'évaluation des politiques publiques en matière de justice. Vous n'êtes pas sans savoir combien le Gouvernement nous a vanté les mérites de sa loi de programmation pluriannuelle sur ce sujet ; il nous a notamment indiqué que la chancellerie et la justice judiciaire avaient pris un véritable tournant numérique. En prenant un peu de recul, on s'aperçoit pourtant que l'un des effets collatéraux de la pandémie de covid-19 a été de soumettre la justice judiciaire à un véritable crash test grandeur nature de son véritable niveau d'informatisation et de performance numérique. Or cette mise à l'épreuve a révélé où se situaient les failles du système. Hélas, nous n'avons pas été déçus, si j'ose dire : le résultat n'est pas brillant – c'est un euphémisme. La crise sanitaire a en effet mis en lumière différents points noirs.

Ainsi, entre le 16 mars et le 11 mai, les procès d'assises ont été purement et simplement reportés, comme la majorité des audiences des tribunaux correctionnels ou civils ; les audiences maintenues étaient principalement celles de comparution immédiate. Or Mme la ministre de la justice, lors de son audition devant la mission d'information sur l'épidémie de covid-19, à l'Assemblée nationale, nous a dit que « les tribunaux restaient ouverts pour traiter les contentieux de l'urgence » ; elle a notamment cité les violences au sein de la famille, les atteintes aux personnes ou encore le non-respect des règles du confinement.

Ce que nous avons vu, c'est surtout la très grande diversité des modalités de fonctionnement des juridictions, et une application des directives de la chancellerie très variable de l'une à l'autre. Ce ralentissement de l'activité des juridictions est inédit, et il est d'autant plus préoccupant qu'il s'ajoute aux difficultés liées à la grève des avocats, en amont de la pandémie, et qui a été particulièrement mal gérée. Il tient en grande partie au manque de lisibilité des plans de continuité de l'activité ; dans certains cas, ils ont même entraîné un arrêt quasi-total des juridictions. Le même constat peut d'ailleurs être fait pour la protection judiciaire de la jeunesse.

Nos interrogations sont simples. Était-il indispensable de réduire à ce point le fonctionnement des juridictions et, si oui, pourquoi ? Pourquoi les systèmes informatiques n'étaient-ils pas prêts, contrairement à ce qu'avait annoncé le Gouvernement ?

Mon diagnostic est sévère. Lorsque la décision de confinement est prise, la chancellerie s'aperçoit que si les magistrats sont certes dotés d'ordinateurs portables, ce qui leur permet de télétravailler, les personnels des greffes n'en possèdent pas. En urgence, on fait distribuer 300 ordinateurs portables – pour 13 000 greffiers !

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