Intervention de Marie-Christine Verdier-Jouclas

Séance en hémicycle du mercredi 10 juin 2020 à 15h00
Débat sur le rapport d'information de la commission des finances sur le printemps de l'évaluation consacré à l'évaluation des politiques publiques 2020

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarie-Christine Verdier-Jouclas :

L'année 2019 fut une année d'application et d'approfondissement des réformes menées depuis le début du quinquennat. Celles-ci ont porté leurs fruits au quatrième trimestre de 2019 : le taux de chômage s'établissait à 8,1 %, soit son plus bas niveau depuis la fin de 2008. On constatait aussi une progression nette des taux de sortie positive des bénéficiaires d'un dispositif de formation ou d'emploi, dont l'un des plus beaux exemples est le taux d'insertion dans l'emploi à l'issue du contrat d'apprentissage.

Cependant, la crise sanitaire a remis en cause les avancées que nous avons enregistrées en matière d'emploi. Pour autant, nous nous félicitons des résultats passés, qui ont permis d'atténuer la crise économique. Nous avons pu prendre des mesures sans précédent, quoi qu'il en coûte et quoi qu'il en coûtera encore. Je ne citerai qu'une des mesures liées à la mission « Travail emploi » dont je suis rapporteure spéciale : le chômage partiel, ou plutôt l'activité partielle. Celle-ci a permis à un travailleur sur deux de conserver son emploi, de préserver son contrat de travail avec, dans la majorité des cas, un maintien du salaire total. Ce sont ainsi 31 milliards d'euros qui ont été investis pour sauver les emplois. Ce n'est pas rien, et ce n'est pas fini : demain, un nouveau dispositif, dénommé « activité réduite pour le maintien en emploi », est appelé à prendre le relais.

Mais nous devons aussi prévoir un plan d'accompagnement des demandeurs d'emploi car les derniers chiffres traduisent une hausse sans précédent du nombre d'inscrits à Pôle emploi : 22,6 % en un seul mois. La crise a fragilisé les structures d'insertion par l'activité économique ; une sous-consommation des aides au poste versées est attendue tant du fait du placement en activité partielle des salariés de ces structures que des moindres recrutements par rapport aux prévisions pour 2019. Dans le même temps, les entreprises adaptées ayant recours à l'activité partielle ne sont pas éligibles à l'aide au poste. Or 93 % d'entre elles se déclarent fermées totalement ou en activité partielle.

Le constat est clair : la contraction de l'emploi affecte déjà, et affectera plus encore les jeunes, les personnes les moins qualifiées ou les personnes en situation de handicap, bref, les Français dont la situation est déjà plus difficile. Or aucune société prospère et durable ne peut tolérer en son sein des exclusions aussi persistantes.

Le plan de relance annoncé au bénéfice de l'apprentissage et de l'emploi des jeunes est primordial, mais les dispositifs actuels doivent être maintenus et amplifiés. Le plan d'investissement dans les compétences voit ainsi sa légitimité accrue. Afin d'aider chacun à retrouver autonomie et dignité par le travail, il est temps de passer à la vitesse supérieure, alors que l'action publique est écartelée entre l'injonction de la maîtrise des dépenses publiques et l'impératif de réponses sociales aux multiples fractures de la société française.

Les entreprises adaptées, l'insertion par l'activité économique, l'expérimentation « territoires zéro chômeur de longue durée » ou encore les emplois francs sont des investissements utiles pour notre nation. Ils contribuent à construire une société et une économie dans lesquelles chaque talent, chaque compétence, chaque individu peut trouver sa place pour faire société ensemble. Il ne s'agit pas d'un slogan, mais bien d'une volonté profonde qui nous impose de mobiliser, aux côtés de l'État, l'ensemble des acteurs de l'inclusion, les collectivités et les entreprises dans un véritable esprit de coconstruction.

Notre feuille de route est simple compte tenu des besoins sociaux que la crise fera naître. Après avoir libéré le travail et l'esprit d'entreprise, nous devons garantir un État qui protège. C'est la raison pour laquelle, à la suite des travaux menés avec mes collègues, Didier Baichère et Christine Cloarec-Le Nabour, le groupe de la majorité présidentielle, conscient de la nécessité, accrue par la crise, de poursuivre notre action, déposera une proposition de loi sur l'insertion par l'activité économique et la prorogation du dispositif « territoires zéro chômeur de longue durée » afin de simplifier et de renforcer ces dispositifs.

Nous devons agir dans trois directions : transformer les crédits non consommés du fait de la crise sanitaire en une aide exceptionnelle aux structures et entreprises adaptées ; inscrire dans la durée et renforcer l'ambition initiale dans le domaine de l'insertion par l'activité économique et des entreprises adaptées en prévoyant d'ores et déjà, monsieur le ministre, un budget pour 2021 supérieur à celui de 2020 afin d'accroître les opportunités offertes aux plus vulnérables ; augmenter les enveloppes dédiées à l'emploi des jeunes, au-delà de ce qui sera voté dans le troisième projet de loi de finances rectificatives dont nous saluons le volet consacré à l'apprentissage.

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