Face à une crise sanitaire d'une intensité inédite et au besoin de réponses rapides, des mesures ont été mises en oeuvre pour accompagner la population, les salariés et le monde de l'entreprise. Le coût de certaines d'entre elles pèse sur les comptes sociaux, mais c'est le rôle de la sécurité sociale de garantir à chacun, en toutes circonstances, les moyens nécessaires pour assurer sa subsistance et celle de sa famille dans des conditions décentes.
Alors que l'équilibre des comptes sociaux se profilait à l'horizon de 2023 et que l'extinction de la dette de la CADES était prévue pour 2024, nous devons aujourd'hui faire face à la dégradation de ces comptes, du fait à la fois de l'effondrement des recettes dû à la chute de l'activité et d'une hausse mécanique des dépenses, notamment celles qui relèvent de l'ONDAM, liée à la prise en charge directe du covid-19.
Le projet de loi organique prévoit le report au 31 décembre 2033 de l'extinction de la dette de la CADES et une adaptation des lois de financement de la sécurité sociale en vue de la création d'une nouvelle branche. Quant au projet de loi ordinaire, il vise à transférer une dette de 136 milliards d'euros à la CADES afin de redonner à l'ACOSS une plus grande agilité de trésorerie. Cela permettra de couvrir les déficits constatés fin 2019 et ceux à venir, ainsi qu'une partie de la dette des établissements publics de santé.
Il prévoit également le transfert d'une partie de la CSG affectée à la CADES vers la CNSA pour financer des dépenses relatives à la perte d'autonomie, ainsi que la prolongation de l'affectation de ressources à la CADES, qui gardera ainsi sa capacité de remboursement. Au travers de ces choix, nous voulons préserver notre système de protection sociale, auquel les Français sont si attachés.
Enfin le projet de loi prévoit la prise en charge d'un nouveau risque, celui de la perte d'autonomie, via la création d'une nouvelle branche. Cette mesure est d'une portée considérable et je salue cette avancée sociale.
Permettez-moi à ce stade de préciser quelques notions qui me semblent fondamentales. L'autonomie renvoie à la liberté de choix, et en ce sens c'est un droit, mais c'est aussi la capacité à accomplir les actes de la vie quotidienne : c'est lorsque cette capacité est atteinte que nous parlons de dépendance. La dépendance, quant à elle, est un état durable entraînant des incapacités et requérant des aides pour accomplir les actes de la vie quotidienne. Il est courant de parler de perte d'autonomie quand il s'agit de personnes âgées et de manque ou d'absence d'autonomie à propos des personnes en situation de handicap. Quoi qu'il en soit, le soutien à l'autonomie est toujours nécessaire pour reculer le plus possible l'entrée dans la dépendance.
Face au défi du vieillissement de la population, il convient dès à présent de prendre les mesures qui permettront de réussir la transition démographique déjà engagée dans notre pays, grâce notamment à une approche plus préventive. C'est de cela qu'il est question aujourd'hui, alors que nous examinons les premiers véhicules législatifs qui, avec le prochain PLFSS et le futur projet de loi relatif au grand âge et à l'autonomie, amorceront une politique de l'autonomie. Ces textes feront date dans l'histoire de la sécurité sociale, dont la structure n'a pas été modifiée depuis 1945, puisqu'ils visent à créer un cinquième risque et une cinquième branche, témoins de la volonté du Gouvernement et de nombreux parlementaires d'inscrire de manière plus visible les besoins spécifiques au grand âge et au handicap dans l'organisation de la sécurité sociale.
Je terminerai mon propos en redisant ce qu'est notre vision du grand âge et de l'autonomie. Il s'agit de garantir la prise en compte de la longévité par notre société. Cette vision s'exprime par des ambitions fortes et mûrement réfléchies : l'ambition d'ouvrir des droits nouveaux, de promouvoir la bien-traitance, l'aide au proche aidant et la qualité de vie : l'ambition de proposer une offre diversifiée, incluant une approche domiciliaire à la hauteur des attentes ; l'ambition d'assurer la coordination entre structures d'accueil et domicile, mais aussi de décloisonner les secteurs sanitaire et médico-social ; l'ambition d'assurer un habitat adapté, quel que soit le lieu de vie ; l'ambition d'instaurer une gouvernance renouvelée et des financements solides et pérennes – c'est évidemment ce que nous voulons inaugurer par la création d'une branche dédiée à l'autonomie – ; enfin et surtout l'ambition d'assurer la reconnaissance et la revalorisation des métiers.
Je sais, monsieur le secrétaire d'État, pouvoir compter sur vous : la création de cette branche en est la preuve.
La reconnaissance du risque de perte d'autonomie et la création de la branche autonomie constituent de réelles opportunités pour renforcer le droit à la qualité de vie des personnes concernées et pour accélérer le processus de transition inclusive. Ce défi sociétal est incontournable, la crise sanitaire ayant révélé l'immense fragilité de celles et ceux qui ont contribué à notre histoire collective et individuelle : les âgés.