… peut-être maladroitement parfois, mais assurément avec la conviction que le système actuel était profondément complexe, injuste et inéquitable.
J'en donnerai trois illustrations.
Premièrement, la proposition de M. Chassaigne va permettre aux chefs d'exploitation retraités de toucher 85 % du SMIC mais, contrairement à ce que vous avez dit, monsieur Jumel, c'est tout sauf simple. Cela va être possible parce qu'en 2014, Mme Touraine avait mis en place les outils juridiques et informatiques nécessaires pour élaborer un système complexe d'attribution de points au titre du RCO, le régime complémentaire obligatoire de retraite des agriculteurs, afin de leur permettre d'atteindre 75 % du SMIC.
La mise en oeuvre avait demandé pratiquement dix-huit mois car il avait fallu refaire tous les déroulés de carrière et recalculer toutes les pensions, y compris pour des personnes en retraite depuis plus de vingt-cinq ans. Ce travail titanesque, la MSA va devoir le refaire en partie. Comment peut-on avoir en 2020 un système si complexe qu'il nécessite dix-huit mois de calcul ?
Deuxième illustration : nous ne traitons pas le cas des artisans et commerçants dont les montants de retraites sont souvent du même ordre de grandeur que celui des agriculteurs. Ce ne serait d'ailleurs pas possible parce qu'ils ont encore moins souvent effectué une carrière complète et que le mode de calcul de leurs pensions est notoirement différent. Il faudrait une fois encore imaginer un dispositif spécifique et complexe pour atteindre les mêmes objectifs. C'est un non-sens !
Dernière illustration : les conjoints-collaborateurs, qui sont les grands oubliés. Comment aborder frontalement, objectivement et, disons-le clairement, budgétairement la situation de millions de personnes n'ayant que peu ou pas cotisé ? Avec notre projet de loi, nous voulions faire avancer ce sujet majeur, au moins pour les futurs retraités, en réfléchissant au statut du conjoint, en valorisant mieux les interruptions de carrière liées aux maternités, en sécurisant aussi les règles de réversion. Force est de constater qu'à cette heure, rien n'a changé.
Si le sujet des retraites agricoles et la proposition de notre collègue Chassaigne nous permettent aujourd'hui de faire autrement, de dépasser nos frontières partisanes, alors ce sera une belle journée. Mais sur les retraites comme sur de nombreux autres sujets, ne nous arrêtons pas à cette seule journée.