Intervention de Fadila Khattabi

Séance en hémicycle du jeudi 18 juin 2020 à 21h30
Garantie salaire-formation — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFadila Khattabi :

La crise sanitaire sans précédent que nous traversons a et aura un impact sur l'économie, et par conséquent sur l'emploi ; elle pourrait engendrer de nombreux licenciements. Ce constat, monsieur le rapporteur, nous le faisons toutes et tous. Nous partageons également les objectifs visés par la proposition de loi : éviter un maximum de destructions d'emplois, protéger davantage les publics précaires, mais aussi revoir le fonctionnement et le contenu du système de formation pour l'adapter à la réalité d'aujourd'hui et mieux répondre aux défis de demain. Tout cela, nous le partageons bien évidemment.

Pour autant, nos points de vue divergent quant à la méthode. En effet, nous pensons que la présente proposition de loi n'est pas adaptée aux enjeux et apporte même une mauvaise réponse en risquant d'alimenter le chômage de longue durée, fléau contre lequel nous luttons depuis de nombreuses années. De toute évidence, nous devons agir pour répondre aux besoins des entreprises tout en assurant la protection des salariés.

Nous estimons qu'il revient aux partenaires sociaux d'engager cette réflexion. C'est pourquoi le Gouvernement a lancé une concertation le 4 juin dernier, qui se poursuit, vous le savez. La méthode retenue correspond aux demandes des organisations syndicales elles-mêmes, comme elles nous l'ont clairement signifié lors de leur audition par la commission. Du reste, elles ne sont pas nécessairement favorables à une généralisation des deux dispositifs que vous proposez d'étendre et de transformer : le contrat de sécurisation professionnelle et le congé de reclassement. Il ne nous appartient pas non plus de fixer la durée et les modalités d'application des deux nouveaux dispositifs que vous souhaitez créer, d'autant que, dans le cadre de la concertation actuelle, les partenaires sociaux étudient les pistes d'évolution des paramètres du CSP. Autrement dit, nous croyons au dialogue social : il serait malvenu de contraindre l'autonomie des partenaires sociaux et d'engager une initiative législative, alors que les négociations ne sont pas terminées.

En attendant, pour faire face à l'urgence, plusieurs outils peuvent être mobilisés par les entreprises en difficulté ; je pense notamment au dispositif d'activité réduite pour le maintien dans l'emploi ou aux accords de performance collective, deux dispositifs qui ont permis de préserver l'emploi jusqu'à présent.

En outre, dans le cadre de la prorogation de l'état d'urgence, le dispositif d'activité partielle sera maintenu ; ce sera une mesure de soutien non négligeable pour les entreprises mais aussi une mesure de protection pour les salariés.

Par ailleurs, dans le cadre des négociations entre le Gouvernement et les partenaires sociaux, les modalités d'un dispositif d'activité partielle de longue durée sont en train d'être élaborés.

Vous l'aurez compris, préserver l'emploi à tout prix est la priorité absolue ! Il nous faut dès lors avoir une vision à long terme. En ce sens, nous partageons votre volonté d'orienter notre économie vers une croissance plus verte. Grâce au plan de relance et de soutien, des réponses ont déjà été apportées à plusieurs secteurs, comme l'automobile, le tourisme ou encore l'aéronautique. Quant à la préservation de la dynamique de formation professionnelle, autrement dit l'élévation des compétences, cela fait partie des grands chantiers définis par le Président de la République dans le cadre des discussions avec les partenaires sociaux. Nous avons l'occasion de revoir notre offre de formation pour qu'elle devienne mieux adaptée aux métiers dits « d'avenir » et aux besoins des entreprises. En effet, dans un contexte économique en pleine mutation, il nous faut repenser notre système de formation professionnelle au vu notamment des enjeux du numérique et de la transition écologique.

Le Gouvernement a par ailleurs renforcé le FNE-formation afin d'inciter les entreprises à former leurs salariés en chômage partiel. Toutes les entreprises ayant recours à l'activité partielle sont ainsi devenues éligibles à ce dispositif. Le coût pédagogique de ces formations est pris en charge par l'État en totalité, grâce à une enveloppe qui est passée de 60 millions à 500 millions d'euros. Il nous faudra probablement réfléchir à un nouveau fléchage du budget du PIC en fonction des réalités territoriales ou encore à de nouvelles règles d'abondement.

Enfin – surtout, devrais-je dire – , la protection de notre marché de l'emploi passe aussi par le soutien à l'embauche de plus jeunes. Ils seront 700 000 à entrer sur le marché du travail en septembre prochain. Face à ce constat, le renforcement de notre système d'apprentissage constitue un levier non négligeable. Le Gouvernement s'est engagé à le renforcer avec un plan de soutien ambitieux, à hauteur d'1 milliard d'euros, afin d'accompagner au mieux les jeunes de notre pays.

Compte tenu de ces enjeux et des moyens qui ont été ou seront prochainement déployés, le groupe La République en marche ne votera pas pour cette proposition de loi.

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