La lutte contre l'épidémie de covid-19 a changé nos habitudes et bouleversé nos quotidiens. Elle a aussi rendu nécessaire la suspension, pendant quelques semaines, du processus démocratique. Hier, dans toute la France, à l'exception de la Guyane, les 16,5 millions d'électeurs vivant dans des communes où le premier tour des élections municipales n'avait pas permis d'élire les conseils municipaux se sont rendus aux urnes pour faire aboutir le processus électoral. En fin de semaine, 5 000 communes désigneront leur exécutif.
Je profite de l'occasion pour remercier les préfets, les maires et toutes les équipes qui ont permis l'organisation du scrutin d'hier dans les meilleures conditions sanitaires et démocratiques possible. Je m'étais engagé devant vous à ce que le ministère de l'intérieur équipe l'ensemble des communes concernées en masques chirurgicaux ou grand public, en visières et en gel hydroalcoolique, et à soutenir les municipalités pour que les contraintes sanitaires entourant cette élection ne coûtent rien au contribuable local : cet engagement a été tenu. Cela dit, sans la mobilisation de l'ensemble des services locaux des préfectures comme des communes, la bonne application des préconisations du Conseil scientifique covid-19 n'aurait pas été au rendez-vous ; je les remercie tout particulièrement.
J'adresse mes félicitations et un salut républicain à tous les nouveaux élus, et je remercie une nouvelle fois toutes les équipes sortantes, qui ont affronté avec courage et volonté la crise sanitaire des derniers mois. Certains pensaient interrompre leur engagement municipal à l'échéance initialement prévue, en mars ; trois mois plus tard, leur implication, restée totale, mérite d'être saluée.
Si, en France métropolitaine, l'épidémie ne montre pour l'heure pas de signe de reprise généralisée, la situation n'est malheureusement pas la même partout dans le monde, en particulier dans l'hémisphère sud, où plusieurs pays restent fortement touchés. Ce constat d'une pandémie toujours en cours à l'échelle mondiale nous a conduits à ajuster le calendrier électoral, notamment pour les élections consulaires et pour certaines zones de notre territoire où la circulation du virus reste active.
En adoptant le projet de loi tendant à sécuriser l'organisation du second tour des élections municipales, vous avez notamment, conformément à l'amendement adopté dans cet hémicycle, annulé les opérations de vote en Guyane et prévu leur réorganisation complète au plus tard en janvier 2021. Vous avez également décidé de reporter à mai 2021 les élections consulaires, dont l'organisation partout dans le monde était impossible au vu de la situation sanitaire. Ces décisions sont sages. Elles étaient nécessaires. Elles ont néanmoins des conséquences, auxquelles le présent texte répondra.
S'agissant d'abord des élections sénatoriales, la jurisprudence du Conseil constitutionnel, en date du 15 décembre 2005, est claire et sans ambiguïté : le renouvellement complet des sénateurs d'une circonscription impose une élection par un collège électoral « en majeure partie » renouvelé. En septembre 2020, les six sénateurs représentant les Français établis à l'étranger de la série 2 devaient être désignés. Si le scrutin se tenait comme prévu, ces nouveaux sénateurs seraient élus, du fait du report des élections consulaires, par le même collège électoral qu'en 2014, ce qui serait inconstitutionnel. C'est la raison pour laquelle le projet de loi organique que je vous propose d'adopter vise à reporter à septembre 2021 le renouvellement des sénateurs représentant les Français établis à l'étranger de la série 2. Leur mandat sera réduit d'un an pour ne pas affecter durablement le calendrier électoral.
Il convient d'évoquer la situation de la Guyane, dont les sénateurs doivent eux aussi être renouvelés en septembre. La situation sanitaire en Guyane nous mobilise pleinement – j'échangeais d'ailleurs à l'instant avec le président de la collectivité territoriale de Guyane, Rodolphe Alexandre. Je salue la mobilisation des collectivités locales, des personnels de santé et des personnels de l'État pour accompagner la Guyane dans le combat contre le covid-19. La situation nous a conduits à annuler le deuxième tour des élections municipales et, dans les communes où il devait avoir lieu – qui ne sont toutefois qu'au nombre de sept – à réorganiser les deux tours d'ici à janvier 2021. Même en l'absence d'un renouvellement total des grands électeurs, les élections sénatoriales pourront donc se tenir à l'échéance prévue.
Le présent projet de loi organique contient plusieurs autres dispositions importantes.
Il reporte à janvier 2021 l'organisation d'éventuelles élections législatives et sénatoriales partielles dans les zones de circulation du virus. Les élus guyanais et des Français établis à l'étranger sont les premiers concernés par cette disposition, qui nous donne les outils nécessaires pour concilier vie démocratique et risques sanitaires.
Le texte comporte également un ajustement nécessaire des dispositions concernant les déclarations à la HATVP – Haute Autorité pour la transparence de la vie publique. Je salue le travail conjoint mené avec celle-ci pour aboutir à ce résultat.
Le texte que vous allez examiner fait l'objet d'un consensus, au-delà des clivages partisans. Je salue le travail du rapporteur, Guillaume Vuilletet, ainsi que l'engagement de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration de la République pour permettre son adoption conforme et, par conséquent, l'entrée en vigueur rapide de ses dispositions.
Le projet de loi organique est à la fois nécessaire et utile. Il illustre la capacité d'adaptation et d'anticipation de notre démocratie. Il est aussi le signe d'un travail parlementaire conjoint et réussi.