La large autonomie dont dispose la Polynésie française, en vertu du statut de 2004 qui régit ce territoire, laisse subsister la compétence de l'État en matière de garantie des libertés publiques. L'article 7 dudit statut précise que, dans ces domaines, « sont applicables en Polynésie française les dispositions législatives et réglementaires qui comportent une mention expresse à cette fin. » Le droit applicable à la Nouvelle-Calédonie est similaire : il confère expressément à l'État la responsabilité d'édicter les règles relatives à la garantie des libertés publiques, sous réserve d'en prévoir l'application par une mention expresse.
Toutefois, il convient de souligner les limites que rencontre l'action de l'État dans ces territoires où la lutte contre l'épidémie de covid-19 relève en premier lieu des autorités locales. La loi organique, vous l'avez dit madame Sage, donne explicitement compétence à la Nouvelle-Calédonie pour l'hygiène publique et la santé ainsi que pour le contrôle sanitaire aux frontières. Si la loi organique statutaire de la Polynésie française n'énumère explicitement que les compétences de l'État, il résulte de son économie générale que la santé publique n'en fait pas partie.
Le régime juridique de l'état d'urgence sanitaire prévu par la loi du 23 mars n'a pas été immédiatement rendu applicable à la Nouvelle-Calédonie et à la Polynésie française : cette adaptation a été réalisée par l'ordonnance 22 avril 2020 adaptant l'état d'urgence sanitaire à la Nouvelle-Calédonie, à la Polynésie française et aux îles Wallis et Futuna. Elle prévoit, à l'article L. 3841-2 du code de la santé publique, que les mesures générales ou individuelles relatives à l'état d'urgence sanitaire sont prises par le haut-commissaire uniquement lorsqu'elles relèvent de la compétence de l'État, et après consultation du gouvernement de la collectivité.
Le choix de la compétence de l'État se justifie par deux éléments : premièrement, le caractère incontestablement extra-sanitaire des mesures prises dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire ; deuxièmement, la nécessité de définir un cadre général cohérent, notamment en matière de libertés fondamentales, qui sont directement concernées par les mesures de quarantaine et d'isolement.
Pour ces raisons, et même si certains ajustements entre l'État et ces collectivités s'avèrent nécessaires – j'espère que le Gouvernement sera en mesure d'apporter des réponses concrètes à ce sujet – je souhaite que l'équilibre général ayant présidé à l'élaboration de l'ordonnance du 22 avril soit préservé. Je serai donc défavorable aux amendements qui reviennent sur cet équilibre mais serai en revanche très favorable aux amendements, tels que celui-ci, qui permettent de préciser et de clarifier ce régime.